"Tout est sous l'eau" : le bilan des inondations au Bangladesh s'alourdit
Le bilan des crues soudaines au Bangladesh s'est alourdi, avec au moins 15 morts et des dizaines de milliers de sinistrés, alors que ce pays se remet de plusieurs semaines de bouleversements politiques.
Les autorités locales ont recensé vendredi 190.000 personnes accueillies dans des centres d'hébergement d'urgence et estimé que 4,5 millions de Bangladais avaient vu leur quotidien affecté par ces inondations, qui frappent cette nation de 170 millions d'habitants régulièrement ravagée au moment de la mousson.
"La situation est catastrophique", s'exclame auprès de l'AFP Zahed Hossain Bhuiya, un secouriste bénévole de 35 ans à Feni, une ville d'environ 160.000 âmes, la plus touchée. "Nous essayons de sauver autant de personnes que possible".
"Tout est sous l'eau !", lâche Nur Islam, un commerçant de 60 ans de Feni dont la maison a été submergée.
- Grande vulnérabilité -
Le ministère bangladais de la gestion des catastrophes a souligné dans un bulletin que le dernier bilan de 15 morts incluait les décès dans des localités situées le long de la côte sud-est.
Il s'agit notamment de Chittagong, la principale cité portuaire, et de Cox Bazar, un district où vivent près d'un million de réfugiés rohingyas de la Birmanie voisine.
Les zones situées à l'est de la capitale Dacca ont également durement souffert, en particulier la ville de Comilla, près de la frontière avec l'État indien de Tripura.
Une grande partie du territoire du Bangladesh, qu'irriguent des centaines de rivières, est constituée de deltas dans lesquels les grands fleuves himalayens, le Gange et le Brahmapoutre, se jettent dans la mer après avoir traversé l'Inde.
Il fait partie des pays les plus vulnérables aux catastrophes liées au changement climatique. Les pluies de mousson y causent chaque année des dégâts considérables mais le réchauffement accroît leur ampleur et leur fréquence.
Selon les médias bangladais, tous les principaux affluents du Gange et du Brahmapoutre, ont débordé.
- Tensions diplomatiques -
Ces inondations surviennent moins de trois semaines après l'éviction de la Première ministre du Bangladesh Sheikh Hasina, qui a été contrainte de s'enfuir en Inde, le principal soutien politique de son gouvernement, à la suite d'un soulèvement amorcé par des étudiants.
Mme Hasina a été remplacée par le prix Nobel Muhammad Yunus qui dirige depuis le 8 août un gouvernement intérimaire chargé de mettre en place des réformes démocratiques.
Asif Mahmud, l'un des leaders des manifestations estudiantines et qui fait maintenant partie de l'équipe de M. Yunus en tant que responsable des sports, a accusé mercredi New Delhi de "provoquer une inondation" en libérant délibérément l'eau des barrages.
Le ministère indien des Affaires étrangères a rejeté ces allégations, affirmant que l'Inde avait connu cette semaine les précipitations "les plus fortes de l'année" et que le débit en aval était dû à des "lâchers automatiques".
Des centaines de personnes se sont regroupées vendredi à l'université de Dacca pour protester contre "l'agression par l'eau" de New Delhi. Sur une banderole déployée pendant le rassemblement, le Premier ministre indien Narendra Modi était représenté en train de se réjouir à la vue de personnes en train de se noyer.
"L'eau en provenance d'Inde a emporté toute notre euphorie", a dit à l'AFP le militant et poète Saikat Amin, en marge de la manifestation.
- Plus de 23 morts en Inde -
Les pluies diluviennes n'ont pourtant pas épargné la population du côté indien de la frontière.
Dans l'État de Tripura, dans le nord-est de l'Inde, plus de 23 personnes ont péri depuis lundi : elles ont perdu la vie à la suite de glissements de terrain, quand d'autres se noyaient, a raconté Sarat Kumad Das, le responsable de l'agence nationale des catastrophes.
Le ministre en chef du Tripura, Manik Saha, a jugé que la situation y était "toujours préoccupante", ajoutant que les opérations de secours se poursuivaient dans les régions les plus touchées de cet Etat, à commencer par le village de Bagafa.
"De la nourriture est distribuée sur place et nous étudions la possibilité d'acheminer des vivres par voie aérienne", a-t-il expliqué dans un communiqué.
(R.Lavigne--LPdF)