Adieu sobre et émouvant à Bernard Pivot dans son fief familial du Beaujolais
Une cérémonie "sobre, à son image": le journaliste et homme de lettres Bernard Pivot a été inhumé mardi au milieu des vignobles dans son fief familial de Quincié-en-Beaujolais, après des funérailles sans fioritures dans la petite église du village.
"C'était très émouvant", a commenté auprès de l'AFP le romancier Pierre Assouline, qui figurait parmi les nombreux écrivains présents dans le bourg de 1.300 habitants, au nord de Lyon, où a grandi le présentateur.
Vers 14H00, son cercueil, en bois clair, sans ornement, est arrivé dans l'église, au son du concerto numéro 1 de Rachmaninov, longtemps générique du rendez-vous littéraire qui a contribué à sa notoriété: Apostrophes.
Plusieurs personnalités, dont Brigitte Macron ou le chef Georges Blanc, s'étaient glissées parmi les quelque 300 personnes réunies pour lui faire leurs adieux.
"Quand vous voyez cette incroyable unanimité, c'est un chagrin national", a commenté l'écrivain Erik Orsenna.
"C'était plus qu'un copain, c'était un frère", a-t-il poursuivi en précisant que leurs liens s'étaient renforcés autour des grandes passions de Bernard Pivot: "La littérature, le foot, le vin et la gastronomie".
- "Gourmandise" -
L'office, ouvert au public, était diffusé sur le parvis pluvieux par haut-parleurs.
Les filles et petites-filles de l'animateur ont prononcé des discours tendres, saluant un père ou "un grand-père d'une générosité sans nom, à l’œil espiègle, aux sourcils broussailleux derrière ses lunettes rondes".
L'homme de lettres a ensuite été inhumé dans le caveau familial, dans la plus stricte intimité.
Les proches ont pu partager un vin d'honneur de la cuvée Bernard Pivot de la cave coopérative de Quincié-en-Beaujolais.
Présent dans l'assistance, Philippe Claudel, auteur des "Ames grises", a estimé que Bernard Pivot, une "figure tutélaire", avait "su trouver une place qui ne peut être prise par personne d’autre" dans le cœur des Français.
Il "avait un grand souci de la rigueur et de l'honnêteté", a ajouté le tout nouveau président de l'Académie Goncourt, cette société littéraire que Bernard Pivot a lui-même présidé jusqu'en 2019. "Je ferai une priorité" d'y préserver ces valeurs, a-t-il assuré.
"Toute ma vie j'ouvrirai un livre avec la même gourmandise parce qu'il m'a appris ça", a renchéri le dramaturge Éric Emmanuel Schmitt.
- Dictée –
Né à Lyon, Bernard Pivot a passé une partie de son enfance dans la maison familiale de Quincié où il a été conseiller municipal à la fin des années 1970. La bibliothèque porte déjà son nom.
"C'était l'enfant du pays, comme on dit chez nous c'était un +Quinciaton+", le nom des habitants de la commune, "il faisait partie de la famille du village", a dit à l'AFP le maire Daniel Michaud qui a prononcé un discours lors des funérailles.
Parce qu'il était "simple et très gentil", Yvette, 77 ans, a tenu à assister à la cérémonie. Elle l'a rencontré chez un fleuriste alors qu'elle achetait des fleurs pour la tombe de son fils. "Il m'a dit qu'il lui ferait un hommage dans son émission, et il l'a fait", raconte-t-elle.
Mardi matin, l'école du village a, par ailleurs, organisé une dictée en l'honneur de celui qui avait lancé en 1985 les Dicos d'or, championnat d'orthographe vite devenu international.
Bernard Pivot est mort le 6 mai à Neuilly-sur-Seine. Un hommage doit ensuite lui être rendu à Paris, selon l'avis d'obsèques publié dans le journal Le Monde par ses proches.
(M.LaRue--LPdF)