Le marché musical français bon élève mais peut mieux faire
"Tout n'est pas si facile", comme rappait NTM: avec 968 millions d'euros de chiffre d'affaires, le marché français de la musique enregistrée progresse de 5,1% en 2023, soit une 7e année consécutive de hausse, mais le streaming par abonnement se traîne, selon les chiffres dévoilés mardi.
Le Syndicat national de l'édition phonographique (Snep), dans un communiqué, dresse un "constat satisfaisant" mais relativise avec "un revenu qui atteint tout juste 53% du niveau historique de 2002".
Sur ces 968 millions d'euros, 620 millions, soit les trois quarts, proviennent du numérique (streaming) contre 195 pour le physique (CD, vinyle), le reste relevant de la synchronisation (films, séries, publicités, jeux vidéos, etc.) et des droits voisins.
C'est là que le Snep pointe "de nouveaux challenges". Au premier plan, la "croissance numérique" est "en retard en France, comparée au Top 10 des marchés mondiaux". La progression "de 10% des revenus du streaming par abonnement" reste "trop faible pour nourrir pleinement le développement du marché", alors "que c'est la première source de création de valeur", développe le syndicat.
La France recense ainsi "12 millions d'abonnements", avec tout "juste un million d'unités (de plus) chaque année depuis trois ans".
- TikTok, la menace -
Soit un taux de pénétration de 16% pour l'abonnement payant, "un des plus faibles" parmi les principaux marchés dans le monde.
Le taux de pénétration de l'abonnement payant est, par comparaison, de 17,5% en Allemagne, 26,5% au Royaume-Uni et 30,1% aux Etats-Unis.
La croissance des revenus de ces abonnements "se tasse ici, alors que notre marché est loin d'être parvenu à maturité", déplore le Snep.
Le développement du streaming payant est "un enjeu de taille dans un contexte inflationniste", poursuit l'organe représentatif. Spotify France, leader mondial du marché du streaming musical, envisage d'ailleurs une augmentation prochaine de son abonnement.
La plateforme se justifie par les coûts supplémentaires "imposés" par la taxe streaming entérinée dans le pays.
Par ailleurs, le Snep relève que les abonnements aux services musicaux "sont en concurrence frontale avec les offres cinéma, audiovisuel et le sport".
Le Snep met en avant "une bataille à gagner", face à "des usages de plus en plus volatiles, de plus en plus concentrés sur les formules de vidéos courtes telles que TikTok".
Le syndicat rappelle que la popularité de cette dernière plateforme "s'appuie sur la musique, qui nourrit 85% de ses contenus, sans pour autant la rémunérer à la hauteur de cette contribution".
- Aya Nakamura, femme puissante -
Et de décrire des "vidéos courtes qui avaient au départ créé une nouvelle source de visibilité et de découverte pour les nouveautés" mais qui "captent et détournent désormais l'attention des fans des services de streaming audio".
Un constat qui résonne avec le conflit actuel entre le géant américain de l'industrie musicale Universal Music Group (UMG) et TikTok, propriété du groupe chinois ByteDance, au sujet de la rémunération des artistes. Ce bras de fer s'est encore durci début mars avec le retrait de la plateforme de plusieurs stars dont Harry Styles, après ceux de Taylor Swift et des Beatles.
Le Snep met toutefois en avant un autre point positif de ce bilan annuel très attendu: "la dynamique et les succès de la production musicale française (ou produite en France au sens plus large)", avec 17 des 20 meilleures ventes d'albums.
Le Snep décerne une "mention spéciale" aux rap, hip-hop, R&B. A noter que Aya Nakamura, star du R&B, est la "seule femme présente dans les 20 premières places pour un projet solo" en France pour les ventes en 2023.
Une donnée à rappeler alors que la Franco-Malienne, qui pourrait chanter en ouverture des Jeux olympiques de Paris (26 juillet-11 août), est ciblée par l'extrême droite française, qui la juge illégitime pour cette exposition mondiale.
(C.Fournier--LPdF)