Comment restaurer les récifs coralliens peut contribuer à les préserver
Les températures record enregistrées dans les océans du fait du changement climatique font mourir les récifs coralliens à travers le monde, un phénomène appelé blanchissement, et les initiatives pour tenter de restaurer ces écosystèmes marins essentiels se multiplient pour tenter de les sauver.
- Comment reconstituer le corail? -
La première possibilité consiste à détacher des fragments de corail d'un récif sain. Ils sont ensuite divisés en plus petits morceaux lors d'un processus appelé micro-fragmentation. Chacun de ces fragments peut ensuite devenir un nouveau corail.
Une autre option consiste à recueillir des morceaux de coraux détachés de manière naturelle, par exemple lors d'une tempête, ce que l'on appelle des coraux d'opportunité.
Les défenseurs de l'environnement ont aussi recours à la collecte d'œufs, plus complexe. La reproduction corallienne, appelée frai, se produit généralement une fois par an. Des colonies entières de récifs libèrent alors leurs œufs en même temps.
De nombreux facteurs entrent en jeu, comme les phases de la Lune ou la température des eaux.
- Et après? -
Les fragments de coraux sont conservés dans des pépinières jusqu'à ce qu'ils deviennent suffisamment solides pour être transplantés sur un récif naturel ou artificiel.
Il en est de même pour les coraux d'opportunité dans le cas où ils ne seraient pas encore assez solides pour être fixés directement sur un récif.
Les œufs et extraits de sperme recueillis lors du frai corallien sont quant à eux transformés en larves, intégrées à des formations naturelles ou artificielles le temps de leur développement.
- Quels coraux sont utilisés? -
Les coraux ramifiés sont en général ceux utilisés. Leurs branches fragiles sont davantage susceptibles de devenir des coraux d'opportunité et sont également plus faciles à micro-fragmenter, contrairement à d'autres coraux.
Leur capacité à se développer très vite offre aux projets de restauration des résultats rapides.
Mais restaurer un seul type de corail peut entraîner une réduction de la diversité de l'écosystème.
- Est-ce que cela fonctionne? -
Les taux de survie après restauration sont compris entre 60 et 70 pour cent, selon une étude publiée en 2020.
Cependant, près de la moitié des projets analysés par cette étude n'ont pas réussi à déterminer clairement s'ils avaient atteint leurs objectifs de départ, y compris l'obtention de la fonction même de récif corallien.
La surveillance de ces projets est souvent brève: moins d'un an dans la moitié des cas, soit bien moins que le temps nécessaire à la formation d'un récif.
Une étude récente présente toutefois des résultats encourageants. Réalisée sur des récifs artificiels en Indonésie, l'étude a révélé qu'en quatre ans, le corail reconstitué émettait autant de carbone que celui d'un récif naturel.
- Quels sont les autres facteurs? -
Certains experts s'inquiètent du fait que la restauration des coraux soit trop souvent présentée comme une panacée.
Ils soulignent que ces transplantations ne pourront survivre que si les conditions environnementales sont favorables.
Il faut selon eux s'attaquer en priorité au changement climatique, responsable des températures extrêmes à l'origine du blanchissement des coraux.
"Des projets de restauration bien conçus et bien conduits ont un rôle important à jouer, mais ils ne peuvent pas faire grand-chose si des actions radicales concernant le climat ne sont pas prises" dans l'immédiat, alerte Lisa Bostrom-Einarsson, la biologiste marine qui a dirigé l'étude de 2020.
La pêche à l'explosif ou encore la sédimentation, facteurs de stress pour le corail, doivent également être combattus pour sauver les récifs coralliens.
L'étude indonésienne a montré que peu de "coraux naturels" s'étaient développés autour des coraux transplantés.
La construction de récifs par micro-fragmentation limite également la diversité génétique, ce qui peut mettre les formations en danger en cas d'apparition de maladie.
"La restauration ne sauvera pas les coraux, vu le rythme actuel auquel nous les perdons" a affirmé Gavin Miller, un scientifique marin de l'organisation Global Reef en Thaïlande.
(A.Renaud--LPdF)