Le Pays De France - Harcèlement: l'Assemblée nationale entend frapper plus fort

Paris -
Harcèlement: l'Assemblée nationale entend frapper plus fort
Harcèlement: l'Assemblée nationale entend frapper plus fort

Harcèlement: l'Assemblée nationale entend frapper plus fort

Pas "d'inertie" de l'Assemblée nationale, malgré les doutes de certains: les sanctions internes en cas de harcèlement moral ou sexuel par un député, notamment sur un collaborateur, sont renforcées.

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"Omerta", "inaction" voire "résistance" au changement au Palais Bourbon... Les critiques se sont multipliées ces dernières années, de la part de quelques députés, des syndicats de collaborateurs ou de l'ancien collectif Chair collaboratrice.

Les syndicats CFDT, SNCP, Solidaires et Unsa de ces 2.000 "petites mains" qui assistent les députés pointent un turn-over qui a "explosé" sous ce quinquennat, dû "en particulier aux situations de harcèlement moral".

Les plaintes sont rares. Mais la presse se fait régulièrement l'écho de procédures aux prud'hommes à l'encontre de députés, de la LFI Muriel Ressiguier pour harcèlement moral au début de la législature à l'élu LREM Stéphane Trompille, condamné pour harcèlement sexuel en 2020. Des accusations démenties à chaque fois par les intéressés.

- "Attente forte" -

Travail de nuit, promiscuité, relation de pouvoir... Face à des conditions propices au harcèlement, l'Assemblée nationale a musclé en février 2020 son dispositif, avec la création d'une cellule anti-harcèlement, pluridisciplinaire et indépendante.

Elle s'adresse aux collaborateurs employés directement par les députés, à Paris et en circonscription, à ceux des groupes politiques, aux quelque 1.300 personnels de l'Assemblée et aux 577 députés eux-mêmes.

La cellule a pour mission d'écouter et conseiller les personnes, et si besoin les accompagner dans des procédures. Elle peut aussi transmettre tous les éléments utiles au déontologue, qui peut lui-même saisir la justice.

Seules 24 personnes ont eu recours à la cellule entre février et décembre 2021. La plupart ont fait état "d'une situation de souffrance au travail ou d'une situation qui s'apparenterait à du harcèlement moral", détaille le déontologue Christophe Pallez dans son rapport d'activité publié mardi.

En outre, deux ont également fait part "de faits qui pourraient être constitutifs d'agissements sexistes ou de harcèlement sexuel".

Trois "signalements" ont été faits à la direction des ressources humaines, s'agissant de personnels des services de l'Assemblée. Neuf cas ont été transmis au déontologue, concernant des collaborateurs de députés - dont cinq signalements visant une seule et même personne mise en cause.

Pour la première fois, le déontologue a ensuite transmis à la justice un dossier pour des faits présumés de harcèlement sexuel. Est visé le député de Gironde ex-LREM Benoit Simian, qu'une de ses collaboratrices accuse de l'avoir contrainte à dormir dans la même chambre que lui, et d'avoir multiplié les messages intimes fin 2020-début 2021, selon Mediapart. Le parquet de Bordeaux vient d'ouvrir une enquête.

Le déontologue, lui-même ancien haut fonctionnaire de l'Assemblée, reconnaît que ce long cheminement et aussi "l’attente forte des victimes" conduisent "à des accusations d'inertie de l'institution".

- Devoir d'exemplarité -

Il a suggéré de prévoir explicitement des sanctions disciplinaires pour harcèlement - du rappel à l'ordre à l'exclusion temporaire.

Il s'agit d'attester "de la volonté" de l'Assemblée de "ne pas tolérer de tels comportements" - sans préjuger d'une décision de justice.

Le bureau de l'institution a suivi lundi soir ses recommandations et modifié le code de déontologie des députés: le harcèlement constitue bien "une atteinte au devoir d'exemplarité". Le déontologue pourra plus facilement saisir sur ce fondement le bureau de l'Assemblée, qui prononcera la sanction adéquate.

Pour prévenir ces agissements, M. Pallez appelle aussi à de la formation: les personnels de l'Assemblée ont pu en bénéficier fin 2021, et les députés devraient selon lui suivre des ateliers de manière obligatoire au début de la prochaine législature.

Avec notamment le hashtag #MeTooPolitique, les initiatrices fin novembre dernier d'un appel à "écarter les auteurs de violences sexuelles et sexistes" dans le monde politique, ont l'oeil sur les investitures ou réinvestitures par les partis en vue des élections législatives de juin.

(V.Blanchet--LPdF)