Crise en Ukraine: la délicate tâche de l'OSCE, garante de la paix
Le spectre d'une invasion russe en Ukraine fragilise le rôle de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), chargée depuis 2014 de soutenir l'application des accords de paix en Ukraine.
Sa mission d'observateurs continue d'opérer sur place mais son avenir est incertain devant l'escalade des tensions avec Moscou et la fin du processus de Minsk acté mardi par le président russe Vladimir Poutine.
- Des accords désormais caducs -
Les accords de Minsk reposent sur trois documents adoptés sous médiation franco-allemande par l'OSCE, l'Ukraine, la Russie et les régions séparatistes de Donetsk et de Lougansk, afin d'instaurer un cessez-le-feu.
Après de premiers accords négociés les 5 et 19 septembre 2014 et restés largement lettre morte, une feuille de route a été conclue en février 2015 pour la mise en oeuvre du texte dit "Minsk 2" à l'issue de négociations longues et ardues.
Le Conseil de Sécurité des Nations Unies avait entériné les accords dans la foulée.
Outre un arrêt des hostilités au sein des zones de conflit dans l'est de l'Ukraine, leur volet militaire exige un retrait des armes lourdes, l'établissement d'une zone tampon et insiste sur un contrôle de la frontière par les forces de Kiev.
En dépit de ces accords, le conflit a fait plus de 14.000 morts depuis 2014, Kiev et les rebelles prorusses s'accusant régulièrement de violer le cessez-le-feu.
Et la reconnaissance par Moscou de "l'indépendance" des deux zones séparatistes leur a porté "un coup fatal", selon le chef de l'ONU.
- Une mission "d'autant plus cruciale" -
"Cette décision perturbe et risque d'ébranler huit ans de travail de la communauté internationale, et de l'OSCE en particulier, pour trouver une solution concertée aux problèmes de la région", a averti la secrétaire générale de l'Organisation Helga Schmid, à l'occasion d'une réunion mardi du Conseil permanent.
Dans ce contexte, "le rôle de la mission spéciale de surveillance est d'autant plus crucial", a-t-elle estimé, mettant en avant son "impartialité".
Cette mission, composée de plusieurs centaines de membres, rédige quotidiennement des rapports au plus près des belligérants, recensant notamment le nombre de violations de la trêve.
Ces observateurs sont les yeux et les oreilles de la communauté internationale et leurs écrits archivés précieusement servent aux différentes capitales pour ajuster leur position diplomatique grâce à des données objectives, alors que la désinformation fait rage.
- Rare forum de dialogue Est-Ouest -
Basée à Vienne - capitale d'un pays neutre - depuis son instauration en 1975, l'OSCE est née au coeur de la Guerre froide pour favoriser le dialogue Est-Ouest.
Elle compte actuellement 57 Etats membres dont les pays de l'Otan comme ceux dans l'orbite russe et a réussi à garder une équidistance entre Washington et Moscou.
Elle ne prête généralement pas le flanc à la critique et le conflit en Ukraine l'avait remise au premier plan en 2014.
Mais des diplomates occidentaux dénoncent l'obstruction pratiquée par Vladimir Poutine, toutes les décisions étant adoptées par consensus, ce qui menace l'Organisation de paralysie.
Depuis l'exacerbation des tensions, elle multiplie les réunions et appelle au dialogue, sous la présidence tournante actuelle de la Pologne.
Sa mission en Ukraine, dont le mandat qui expire le 31 mars doit être prochainement renouvelé par les Etats, n'a pas prévu de plier bagage.
Mi-février, son chef Yasar Halit Cevik faisait cependant état "d'entraves répétées" à la liberté de mouvement de ses membres, constituant "un problème existentiel".
Il a aussi évoqué le "défi" que constitue "le rappel par certains Etats membres de leurs observateurs", justifié par des questions de sécurité. Plusieurs pays, dont les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, ont en effet retiré leurs effectifs.
(F.Moulin--LPdF)