Boutcha : des images satellite américaines semblent réfuter la version russe
Des images satellite publiées lundi par la société américaine Maxar Technologies semblent réfuter les affirmations russes selon lesquelles les cadavres de personnes en vêtements civils trouvés dans la ville ukrainienne de Boutcha y étaient déjà avant que les troupes russes n'évacuent les lieux.
Les accusations de crimes de guerre et crimes contre l'humanité (bombardements indiscriminés des villes ukrainiennes, enlèvements de civils, viols, tortures, meurtres, etc), qu'elles proviennent des autorités ukrainiennes, des médias ou d'ONG, se sont multipliées depuis l'invasion de l'Ukraine le 24 février par les Russes, qui sont depuis confrontés à une féroce résistance des forces de Kiev et nient les exactions.
Sur les images de Maxar remontant jusqu'à la mi-mars, on peut distinguer plusieurs corps de civils étendus morts dans une rue de Boutcha ou sur le bas-côté.
L'armée ukrainienne a repris il y a quelques jours cette ville au nord-ouest de Kiev aux Russes. Les autorités ukrainiennes ont affirmé au cours du week-end avoir trouvé à Boutcha de nombreux corps après le retrait des troupes ennemies.
Dans une analyse de gros plans de la rue Iablonska fournis par Maxxar, le quotidien américain New York Times écrit lundi, après les avoir comparés avec des images vidéo des corps jonchant cette rue tournées les 1er et 2 avril, que nombre d'entre eux étaient là depuis trois semaines au moins, lorsque les forces russes contrôlaient la ville.
Samedi, l'AFP a vu à Boutcha les cadavres d'au moins 22 personnes portant des vêtements civils dans des rues de la ville. L'une d'elles était couchée près d'un vélo et une autre avait des sacs à provisions à côté d'elle. Un cadavre avait les mains liées dans le dos.
Lundi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a rejeté "catégoriquement" toutes ces accusations, assurant que les experts du ministère de la Défense russe avaient découvert des signes de "falsifications" dans les images présentées par les autorités ukrainiennes comme preuves d'un massacre russe.
- "Guerre de l'information" -
Ce démenti a été répété à New York (Etats-Unis) lors d'une conférence de presse de l'ambassadeur russe aux Nations unies, Vassily Nebenzia.
"Tout à coup (ces corps) apparaissent dans les rues, étendus au sol, un par un, qui à droite, qui à gauche, certains bougeant, d'autres montrant des signes de vie", a déclaré M. Nebenzia, dénonçant une mise en scène "arrangée par la machine de guerre de l'information ukrainienne".
Mais selon les images satellite Maxar datées des 19 et 21 mars, plusieurs corps jonchaient déjà la rue Iablonska à ces dates.
Et selon l'analyse du New York Times, ces images révèlent des traits sombres d'une taille similaire à celle de corps humains sur cette même rue dès les 9 et 11 mars.
De nombreux corps présents sur les images satellite apparaissent exactement dans la même position au sol que celle révélée par une vidéo de la rue Iablonka prise par un conseiller municipal local ou par les photographies publiées par des médias internationaux.
Dans une autre comparaison par recoupement d'images, le New York Times a analysé une vidéo publiée sur Instagram d'un corps allongé dans la rue devant deux voitures. Selon le quotidien, une image Maxar du 21 mars montre le corps et les deux véhicules dans le même position, au même endroit.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s'est rendu lundi à Boutcha, où il a dénoncé des "crimes de guerre" et un "génocide" après la mise à jour de dizaines de cadavres portant des vêtements civils dans la ville et dans d'autres localités près de la capitale ukrainienne.
"Vous êtes ici et vous pouvez voir ce qui s'est passé. Nous savons que des milliers de personnes ont été tuées et torturées, ont eu des membres déchirés, des femmes ont été violées et des enfants tués", a-t-il déclaré lors d'un point de presse improvisé, après avoir fait quelques mètres dans une rue du centre-ville jonchée de carcasses déchiquetées de véhicules de transports de troupes et de blindés russes, au milieu de maisons détruites.
(L.Garnier--LPdF)