Présidentielle: entre Macron et Le Pen ça devient personnel
Ils ne se quittent plus d'une semelle et se rendent coup sur coup. Les deux finalistes à la présidentielle, Emmanuel Macron et Marine Le Pen, s'affrontent vendredi par médias interposés, projet contre projet et sur un ton nettement plus personnel.
Pour le président sortant, le programme de sa rivale d'extrême droite n'est pas "la douceur incarnée". Sa présidence a été "affreusement autoritaire", lui répond Marine Le Pen.
Interrogé sur franceinfo sur les accusations de "brutalité" par son adversaire, M. Macron a affirmé ne pas avoir "le sentiment que les positions du Rassemblement national soient des positions douces, je n'ai pas le sentiment que ce soit la douceur incarnée".
Dans un geste sur sa gauche, Emmanuel Macron a par ailleurs promis en réponse à une jeune femme handicapée de "bouger" sur l'individualisation de l'allocation adulte handicapés, une évolution que son gouvernement et sa majorité a rejetée plusieurs fois l'an dernier.
Au lendemain de son premier grand meeting depuis le premier tour, à Avignon, la candidate RN, qui y avait appelé à "faire barrage au retour d'Emmanuel Macron", a enchaîné vendredi matin par une visite d'un marché au Pertuis, dans le Vaucluse.
Interrogée dans la matinée sur BFMTV et RMC sur son image, Marine Le Pen a répondu: "Vous ne croyez pas qu'il y a des millions, des dizaines de millions de Français qui considèrent que le gouvernement d'Emmanuel Macron a été un gouvernement affreusement autoritaire, qu'il a gouverné seul, avec brutalité, qu'il a réprimé des manifestations?"
"La politique aujourd'hui, ce n'est pas le gouvernement du peuple par le peuple pour le peuple. C'est le gouvernement par un petit nombre pour un petit nombre", a-t-elle encore dit.
- Macron dans la foule -
A neuf jours du scrutin, le président sortant garde l'avantage dans les intentions de vote (de 53 à 55%) mais avec une marge moindre qu'il y a cinq ans (64/36%). Et avec toujours plusieurs inconnues, notamment le niveau de l'abstention et le report des 21,95% de voix qui se sont portées dimanche sur le candidat Insoumis Jean-Luc Mélenchon.
Cette campagne d'entre-deux-tours ne ressemble en rien à celle du premier, qui s'était déroulée dans l'ombre de la guerre en Ukraine qui avait beaucoup mobilisé le président-candidat.
Il n'avait fait qu'un seul meeting, peu de déplacements et s'était refusé à débattre avec les 11 autres prétendants à l'Elysée, déclenchant la colère de ses adversaires, qui l'avaient accusé de vouloir "enjamber" le scrutin.
Depuis le début de la semaine, Emmanuel Macron a considérablement allégé son agenda diplomatique. Il multiplie les immersions en région dans le Nord, en Alsace et en Normandie avant un grand meeting samedi à Marseille, avec des rencontres et échanges parfois vifs à l'occasion de longs bains de foule.
- "France des oubliés" -
Changement de ton et de rythme aussi pour Marine Le Pen qui depuis plusieurs semaines menait une campagne à bas bruit, favorisant les déplacements dans de petites localités de la "France des oubliés" autour de la thématique du pouvoir d'achat.
Et laissant les propos les plus radicaux sur l'immigration à son rival d'extrême droite Eric Zemmour, elle tentait ainsi de lisser son image tout en conservant un programme de rupture.
Depuis lundi, elle va de média en média et a fait des conférences de presse sur la réforme des institutions et la diplomatie, deux sujets régaliens par excellence.
Tout a en effet changé après le premier tour. "On est à front renversé: Emmanuel Macron va chercher dans cette campagne à rétablir une image de proximité qu'il n'a pas et Marine Le Pen va chercher à conforter, installer une image de crédibilité qu'elle a moins que Macron", analyse auprès de l'AFP Bernard Sananès, président de l'institut de sondage Elabe.
"Elle fait tout pour ne pas prendre le risque de réactiver cette image de candidate dangereuse", renchérit la directrice générale d'Odoxa, Céline Bracq, en précisant qu'elle "veut faire oublier ce qu'est le RN".
Interrogée à ce sujet sur BFMTV et RMC, Mme Le Pen a estimé que "la vraie question (...) c'est : est-ce que c'est moi qui leur fais peur? Ou est-ce que c'est le pouvoir en place?".
(A.Monet--LPdF)