Ukraine : Poutine honore une brigade accusée d'exactions à Boutcha, son armée progresse dans l'est
Vladimir Poutine a honoré lundi une brigade que l'Ukraine a accusée d'avoir participé aux exactions de Boutcha, pendant que son armée bombardait des cibles dans plusieurs régions et progressait dans l'est, où elle s'est emparée d'une ville du Donbass.
Des frappes russes ont notamment fait au moins sept morts à Lviv, la grande cité de l'ouest, tandis que l'Union européenne a condamné "la poursuite des bombardements aveugles et illégaux de civils et d'infrastructures civiles par les forces armées russes".
Par ailleurs, la télévision publique russe a montré deux Britanniques capturés en Ukraine qui demandent à être échangés contre un riche homme d'affaires ukrainien proche du Kremlin, Viktor Medvedtchouk.
Or l'Ukraine a affirmé que les forces russes et notamment cette unité avaient commis un massacre de civils à Boutcha, dans la périphérie de Kiev.
La découverte dans des rues de cette localité de cadavres de civils, peu après le retrait des soldats russes, avait suscité début avril une vague d'indignation internationale. Des enquêteurs ukrainiens s'y activent toujours pour réunir des éléments constitutifs de "crimes de guerre".
La Russie avait de son côté démenti tout "crime de guerre", assurant au contraire que les autorités ukrainiennes et les médias occidentaux avaient mis en scène le massacre ou que les forces ukrainiennes l'avaient perpétré pour en accuser Moscou.
En Russie toujours, la télévision publique (VGTRK) a diffusé lundi une vidéo montrant deux Britanniques, Shaun Pinner et Aiden Aslin, faits prisonniers dans les combats en Ukraine.
Les traits tirés, ils s'adressent au Premier ministre Boris Johnson dont ils attendent qu'il négocie leur libération contre celle de Viktor Medvedtchouk, récemment arrêté en Ukraine.
Kiev a pour sa part diffusé une vidéo de cet homme d'affaires, dans laquelle il dit vouloir être échangé "contre les défenseurs de Marioupol et ses habitants".
Dans un communiqué du ministère britannique des Affaires étrangères, la famille de Shaun Pinner déclare travailler avec Londres, aux côtés des proches d'Aiden Aslin, pour faire en sorte que "leurs droits en tant que prisonniers de guerre soient respectés en vertu de la Convention de Genève".
Selon sa famille, Shaun Pinner n'est "ni un volontaire ni un mercenaire, mais sert officiellement dans l'armée ukrainienne". Après avoir naguère été dans l'armée britannique, il s'était installé en Ukraine où il avait épousé une Ukrainienne.
Cette "guerre de vidéos" intervient à un moment où, sur le terrain, les forces russes ont effectué des frappes dans plusieurs régions d'Ukraine.
- Au moins sept morts à Lviv -
Dans le nord-est, la grande ville de Kharkiv a de nouveau été bombardée lundi. Bilan : au moins trois morts.
Selon le Parquet régional, un obus tombé en fin de matinée sur un terrain de jeux pour enfants dans un quartier d'habitation a entraîné la mort d'un homme et d'une femme et endommagé des immeubles.
Dimanche déjà, au moins cinq personnes avaient péri et 20 autres avaient été blessées dans une série de frappes russes sur Kharkiv.
Dans l'ouest, à Lviv, "cinq puissantes frappes de missiles" ont touché lundi "des infrastructures civiles", a annoncé Mikhaïlo Podoliak, un conseiller du président ukrainien Volodymyr Zelensky.
Le gouverneur régional, Maksym Kozitsky, a pour sa part évoqué quatre tirs de missiles de croisière, à partir de la mer la Caspienne : trois sur des installations militaires et une sur un garage, qui ont provoqué des incendies.
Sept personnes ont été tuées et "onze blessées, dont un enfant, "toutes les cibles sont "gravement endommagées".
A environ quatre kilomètres du centre-ville, des journalistes de l'AFP ont vu le garage en feu, avec des carcasses de voitures dans un cratère près d'une voie ferrée.
Située loin du front, près de la frontière polonaise, Lviv s'est convertie en cité-refuge pour les personnes déplacées et avait été peu visée jusqu'alors par les frappes russes, contrairement à l'est de l'Ukraine où se concentre désormais l'essentiel des combats.
- "Détruire le Donbass" -
Dans un message vidéo dimanche soir, Volodymyr Zelensky a affirmé que les soldats russes se préparaient à "une offensive dans l'est de notre pays dans un avenir proche. Ils veulent littéralement achever et détruire le Donbass".
"Tout comme les militaires russes détruisent Marioupol, ils veulent anéantir d'autres villes et d'autres communautés dans les régions de Donetsk et de Lougansk", a-t-il poursuivi, avant de lancer : "nous faisons tout pour assurer la défense".
La Russie est déterminée à s'emparer de Marioupol, dont les derniers défenseurs ont ignoré dimanche un ultimatum de l'armée russe qui leur demandait de déposer les armes.
"Non, la ville n'est pas tombée. Nos militaires y sont toujours. Ils combattront jusqu'au bout", avait déclaré avant lui le Premier ministre ukrainien Denys Chmygal.
La prise de cette cité portuaire constituerait une victoire importante pour les Russes car elle leur permettrait de consolider leurs gains territoriaux côtiers le long de la mer d'Azov en reliant la région du Donbass, en partie contrôlée par leurs partisans, à la Crimée que Moscou a annexée en 2014.
D'après le directeur exécutif du Programme alimentaire mondial David Beasley, plus de 100.000 civils sont au bord de la famine à Marioupol, manquant également d'eau et de chauffage.
- "Cette semaine risque d'être difficile" -
Les forces russes continuaient par ailleurs leur progression dans d'autres territoires de l'est de l'Ukraine, comme à Kreminna où elles ont pénétré lundi, après "une importante attaque dans la nuit", a annoncé le gouverneur de la région de Lougansk, Serguiï Gaïdaï.
"L'armée russe y est déjà entrée, avec une énorme quantité de matériel de guerre (...) Nos défenseurs se sont repliés sur de nouvelles positions", a-t-il ajouté.
Kreminna, qui compte environ 18.000 habitants, se trouve à une cinquantaine de kilomètres au nord-est de Kramatorsk, la capitale ukrainienne du Donbass.
Dans la nuit de dimanche à lundi, une frappe a touché un quartier au nord-est de Kramatorsk, sans faire de dégâts. Un journaliste de l’AFP a vu un cratère dans un petit terrain vague près d’un hôtel fermé et une usine désaffectée.
Peu avant, le gouverneur Serguiï Gaïdaï avait exhorté les civils à évacuer la région de Lougansk.
"Cette semaine risque d'être difficile", a-t-il prévenu. Maintenant "c'est peut être la dernière fois que nous avons une chance de vous sauver" en quittant les zones de combat, a-t-il dit.
Mais la vice-Première ministre ukrainienne, Iryna Verechtchouk a déclaré qu'aucun couloir humanitaire pour l'évacuation de civils ne serait mis en place lundi, pour la deuxième journée consécutive, car "les occupants russes ne cessent de les bloquer et de les bombarder".
(H.Leroy--LPdF)