Un homme tué lors de manifestations au Sri Lanka, plongé dans la crise
Un homme a été tué mardi par la police au Sri Lanka, le premier en plusieurs semaines de protestations antigouvernementales, et 24 personnes ont été blessées lors de nouvelles manifestations dans le pays plongé dans une crise économique, ont annoncé des responsables.
La police a tiré sur un groupe qui bloquait une autoroute à Rambukkana, dans le centre de l'île, pour protester contre les pénuries aiguës de pétrole et les prix élevés, ont déclaré des responsables de l’hôpital et de la police.
"Un homme est mort de blessures par balle", a déclaré à l’AFP un responsable de l’hôpital, par téléphone.
La police a affirmé avoir lancé des gaz lacrymogènes pour disperser une foule sur le point de mettre le feu à un camion-citerne transportant du diesel.
Mais "au lieu de se disperser, la foule a commencé à lancer des pierres. À ce moment-là, les policiers ont tiré", a dit un porte-parole, Nihal Thalduwa, dans un communiqué.
Un couvre-feu a été imposé dans la région, ont déclaré des responsables officiels.
Le Sri Lanka traverse la plus grave crise économique connue depuis son indépendance en 1948, avec des pénuries de biens essentiels et des coupures d’électricité régulières.
D’énormes manifestations ont appelé à la démission du gouvernement qui se prépare à négocier un renflouement urgent avec le Fonds monétaire international de 3 à 4 milliards de dollars.
Le Sri Lanka a annoncé le 12 avril faire défaut sur sa dette extérieure de 51 milliards de dollars.
Mardi, des manifestations spontanées ont éclaté dans toute l'île où, selon la police et les autorités locales, des dizaines de milliers d'automobilistes en colère ont incendié des pneus et bloqué des routes pour protester contre la pénurie de carburant et la hausse des prix.
Le principal distributeur de carburant du pays, Ceylon Petroleum Corporation (CPC), a ainsi accrû ses tarifs de 64,2%, juste après que le distributeur privé Lanka IOC, qui représente un tiers du marché du carburant, eut augmenté les siens de 35%.
- "Les gens souffrent" -
Ces manifestations d'automobilistes ont eu lieu parallèlement à celle qui se déroulait à Colombo, pour la 11e journée d'affilée, appelant à la démission du président Gotabaya Rajapaksa.
Les médecins du principal hôpital pour enfants du pays ont également manifesté mardi devant l'établissement pour réclamer des médicaments et du matériel médical.
L’ambassadrice des États-Unis au Sri Lanka, Julie Chung, s’est dite "profondément attristée" par les incidents de mardi en appelant à "une enquête complète et transparente" et au "respect" du "droit du peuple à manifester pacifiquement".
Le barreau du Sri Lanka a également appelé à une enquête impartiale sur les violences.
Pour tenter de désamorcer la crise, le président Rajapaksa a nommé lundi un nouveau gouvernement dont deux de ses frères et un neveu ont été écartés. Il a toutefois maintenu son frère aîné et chef du clan, Mahinda Rajapaksa, au poste de Premier ministre.
Des dizaines de députés de la coalition de Rajapaksa ont changé de camp et pris place mardi sur les bancs de l'opposition.
"Les gens souffrent à cause de la crise économique et je le regrette profondément", avait déclaré la veille le président au nouveau cabinet, concédant que le Sri Lanka aurait dû s'adresser au FMI "beaucoup plus tôt".
Il a également admis que le gouvernement avait commis une "erreur" en interdisant les produits agrochimiques l'an dernier, une mesure prise pour économiser les devises dont le pays est également à court. La mesure a eu un effet dévastateur sur les rendements agricoles.
La pandémie de Covid-19 a joué un grand rôle dans l'effondrement de l'économie en privant cette île d'Asie du Sud d'une ressource essentielle, le tourisme.
Alors que les échanges ont été suspendus à la Bourse de Colombo, le gouvernement a pressé les ressortissants sri lankais expatriés de faire dons de devises à leur pays pour lui permettre l'achat de biens essentiels.
(M.LaRue--LPdF)