Le Pays De France - Les Slovènes votent nombreux sur fond d'inquiétudes pour l'État de droit

Paris -
Les Slovènes votent nombreux sur fond d'inquiétudes pour l'État de droit

Les Slovènes votent nombreux sur fond d'inquiétudes pour l'État de droit

Les Slovènes se sont fortement mobilisés dimanche pour élire leurs députés, avec en jeu la reconduction ou non du Premier ministre conservateur Janez Jansa, accusé d'atteintes à la démocratie.

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Le dirigeant controversé de 63 ans, cravate jaune et bleue aux couleurs de l'Ukraine, a voté dans son village d'Arnace (nord-est), exprimant son souhait "de poursuivre sur la voie" empruntée depuis mars 2020, date de son arrivée au gouvernement.

"De nombreux projets ont été mis en place et ce serait dommage qu'ils soient interrompus", a-t-il dit, alors que son action à la tête de ce pays de 2 millions d'habitants est contestée depuis des mois par des manifestations.

"Ce sont les élections les plus importantes depuis l'indépendance" en 1991 de cette nation issue de l'ex-Yougoslavie, a assuré de son côté Jansa Jenull, un des chefs de file du mouvement de contestation.

M. Jansa est donné au coude-à-coude avec le candidat libéral Robert Golob, ex-entrepreneur dans l'énergie solaire récemment converti à la politique. Pour cet ingénieur de 55 ans, ce scrutin est "un référendum sur la démocratie".

Les premiers sondages de sortie des urnes sont attendus dès la fermeture des bureaux à 19H00 (17H00 GMT).

- Choc des visions -

"Je ne pense pas que la situation soit si mauvaise mais j'ai le sentiment que la démocratie a subi des assauts depuis deux ans", commentait après avoir voté une retraitée, Marija, qui n'a pas voulu donner son nom de famille.

"Il y a eu tellement de manifestations, il est évident que la plupart des gens ne sont pas satisfaits", soulignait Sara Rigler, étudiante en psychologie de 21 ans, après avoir voté dans la capitale Ljubljana.

Le gouvernement "s'est livré à des atteintes répétées à l'État de droit et aux institutions démocratiques", relève l'influente ONG américaine Freedom House dans son rapport annuel publié cette semaine, citant "les attaques" contre l'appareil judiciaire et les médias.

Admirateur assumé de l'ancien président américain Donald Trump et allié de l'ultra-conservateur hongrois Viktor Orban, Janez Jansa a privé pendant des mois de fonds publics l'agence de presse nationale STA, jugée trop critique.

Face aux avertissements de la Commission européenne, il a étrillé des "bureaucrates surpayés", multipliant les passes d'armes avec Bruxelles tout en ignorant la fronde de la rue.

Interrogé par l'AFP, Uros Esih, commentateur politique du grand quotidien Delo, voit dans ce scrutin "un combat entre les forces libérales et illibérales".

Il craint qu'une victoire de Janez Jansa ne rapproche la Slovénie de la Hongrie, où M. Orban, largement réélu début avril, a muselé les institutions.

"Auparavant perçu comme un modèle en Europe de l'Est", le petit pays alpin est devenu "un des plus grands trublions, avec des libertés qui se restreignent", selon l'analyste Valdo Miheljak.

- "Excellent travail" -

S'il est élu, M. Golob promet de renouer avec la "normalité".

D'après les sondages, son Mouvement de la liberté recueillerait 27,7% des suffrages. Il peut en outre compter sur le soutien de plusieurs formations du centre-gauche pour réunir une majorité au sein du Parlement de 90 sièges.

Pas très loin derrière, avec 24% selon des estimations, le Parti démocratique slovène (SDS) de Janez Jansa pourrait au contraire avoir du mal à bâtir une coalition.

Les analystes mettent cependant en garde contre tout pronostic hâtif, au vu du nombre d'électeurs indécis.

"J'espère que le gouvernement va rester en place. Ils ont fait un excellent travail", a estimé Andrej Mazej, un prêtre interrogé par l'AFP devant le bureau de vote du Premier ministre.

Si dans la Hongrie voisine, la campagne des récentes législatives a été dominée par la guerre en Ukraine, elle n'a pas influé sur les débats en Slovénie, où les différents partis s'accordent tous sur un soutien à Kiev.

Janez Jansa, farouchement antirusse, s'est rendu mi-mars sur place avec ses homologues polonais et tchèque, première visite de dirigeants étrangers dans la capitale ukrainienne assiégée.

(E.Beaufort--LPdF)