Le PS sur le point d'intégrer une alliance historique menée par LFI
L'alliance historique à gauche est sur le point d'aboutir: la France insoumise et le Parti socialiste ont conclu un accord mercredi pour les législatives, faisant des compromis tant sur les circonscriptions que sur le programme. Mais le vote d'approbation interne aux socialistes s'annonce délicat.
EELV dimanche soir, le PCF mardi et le PS mercredi. La France insoumise, forte des 22% de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle, est en passe de réunir ses anciens concurrents pour les scrutins des 12 et 19 juin.
Après une semaine de négociations, Insoumis et socialistes se sont accordés dans la nuit de mardi à mercredi sur l'épineux dossier des circonscriptions, puis ont annoncé l'accord global dans l'après-midi.
Le but affiché, "empêcher Emmanuel Macron de poursuivre sa politique injuste et brutale et battre l'extrême-droite", déclarent les deux formations. Corollaire, "le Premier ministre serait issu du plus grand groupe à l'Assemblée, soit Jean-Luc Mélenchon".
Par cet accord, le PS rejoint la "Nouvelle union populaire écologique et sociale", dont EELV et le PCF sont déjà membres en vertu des accords passés ces trois derniers jours.
Les socialistes obtiennent 70 circonscriptions, a indiqué la direction du PS à l'AFP, sans préciser combien étaient gagnables, si ce n'est que les "députés sortants désireux de l'accord ont été préservés".
Le texte programmatique a en revanche nécessité des compromis. Figure ainsi explicitement, à la demande du PS, "la défense de la République laïque et universaliste".
Les deux formations assument "des histoires différentes avec la construction européenne", mais l'objectif est commun: "mettre fin au cours libéral et productiviste de l'Union européenne".
LFI et le PS font un compromis lexical sur les traités en appelant à "ne pas respecter certaines règles" qui empêcheraient l'application du programme. "Nous parlons de désobéir pour les uns, de déroger de manière transitoire pour les autres".
Pour la retraite à 60 ans, elle sera "pour tous" mais le PS a fait ajouter: "avec une attention particulière pour les carrières longues, discontinues et les métiers pénibles".
N'ont pas posé de problème le SMIC à 1.400 euros nets, le blocage des prix de première nécessite, l'abrogation de la loi El-Khomri (une socialiste), la planification écologique, la VIe République...
L'accord n'est pas encore tout à fait effectif: le Conseil national sera convoqué pour jeudi soir par le bureau national, c'est-à-dire l'exécutif du PS, qui se réunira mercredi à 18H30. Car Olivier Faure, premier secrétaire du PS, veut prendre le temps de convaincre ses 300 membres.
"Je ne dirais pas que c'est une formalité, au contraire", avertit son entourage. "Il y aura des déçus, chez les fédérations moins servies que d'autres" en circonscriptions.
- "Prouesse" -
Le nombre de circonscriptions obtenues est inférieur à celui d'EELV - une centaine dont une trentaine gagnable - mais supérieur aux communistes - 50 dont 16 gagnables.
La direction du PS se félicite que les "1,7% de la présidentielle (soit le score d'Anne Hidalgo) se soient transformés en 70 circonscriptions, une prouesse".
Elle déplore en revanche la bataille perdue pour Lamia El Aaraje dans la 15e circonscription de Paris, où va être investie l'insoumise historique Danielle Simonnet. "Les négociateurs ont bataillé mais LFI a refusé de la considérer comme sortante", car son élection en 2021 a été invalidée par le Conseil constitutionnel en janvier.
Mécontente pour cette protégée d'Anne Hidalgo, la fédération PS de Paris va probablement appeler ses représentants au Conseil national à voter contre l'accord, a indiqué Rémi Féraud, chef de la majorité socialiste au Conseil de Paris, à l'AFP.
"Un accord avec la LFI ? Pas pour moi", a tweeté le maire PS de Paris Centre, Ariel Weil.
Anne Hidalgo, elle, n'a pas l'intention de sortir de son silence, préférant "se concentrer sur Paris", selon son entourage à l'AFP.
Le coordinateur de LFI Adrien Quatennens a jugé sur franceinfo que sa formation avait fait preuve de générosité, en ayant "tenu compte de l'implantation territoriale des différentes formations politiques".
Parallèlement, des discussions se poursuivent avec le petit parti trotskiste NPA, enthousiaste au départ mais désormais rebuté par l'alliance avec le PS, avatar selon lui du "social-libéralisme".
- "Renaissance" et dissidences -
Les nouveaux partenaires vont se retrouver pour une "photo de famille" rapidement, selon plusieurs cadres de partis, avant la convention d'investiture commune, qui est en train d'être conçue pour samedi.
En plus du vote délicat au Conseil national, Olivier Faure doit composer avec la fronde d'un courant minoritaire et de figures historiques du parti, comme l'ancien président François Hollande et l'ancien Premier ministre Bernard Cazeneuve qui menace de partir.
Son ancien ministre de l'Agriculture, le maire du Mans Stéphane Le Foll, s'est dit sur France 2 prêt à "conduire la campagne" des dissidents, "tous ceux qui vont être candidats quand même parce qu'ils n'accepteront pas l'accord".
Les dissidences pourraient toucher tous les partis. A Vénissieux dans la banlieue de Lyon, la maire communiste Michèle Picard n'entend pas céder sa place à l'Insoumis investi, le journaliste controversé Taha Bouhafs.
(L.Chastain--LPdF)