Olaf Scholz obtient un répit dans un scrutin régional
Le chancelier allemand Olaf Scholz, de plus en plus fragilisé au plan national, a obtenu un répit dimanche avec une victoire de justesse de son parti social-démocrate face à l'extrême droite, dans une élection régionale clé.
Selon les estimations des chaînes de télévisions publiques ARD et ZDF, le SPD est crédité d'un peu plus de 31% des voix, contre un peu plus de 29% pour l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) à l'issue de ce scrutin dans le Brandebourg, Etat régional qui entoure la capitale Berlin dans l’est du pays.
Ce score traduit une nouvelle percée de l’extrême droite allemande --elle avait obtenu 23,5% en 2019--, après deux scores déjà record lors de deux autres scrutins régionaux le 1er septembre, en Thuringe, que l’AfD avait remporté, et en Saxe, où elle était arrivée juste derrière les conservateurs.
"C'est un résultat très fort", a affirmé le coprésident de l'AfD, Tino Chrupalla. A l'avenir, "l'AfD sera incontournable", a-t-il affirmé à la chaîne ZDF. L'autre coprésidente Alice Weidel a donné rendez-vous "aux législatives" prévues dans un an.
Le résultat du Brandebourg constitue néanmoins une déception pour ce mouvement antimigrants et prorusse, qui jusqu’à ces derniers jours était donné en tête devant les sociaux-démocrates dans les sondages.
- "Un immense défi" -
Pour le SPD il s’agit d’un succès inespéré alors qu’il reculait à chaque scrutin depuis des mois et qu’au plan national il atteint, à l’image du chancelier Olaf Scholz, des records d’impopularité.
Cette victoire doit néanmoins assez peu à Olaf Scholz et beaucoup au chef du gouvernement régional du Brandebourg, Dietmar Woidke.
Au pouvoir dans la région depuis 2013, ce social-démocrate reste très populaire et avait transformé le scrutin en plébiscite sur sa personnalité et en élection pour ou contre l'extrême droite.
Il avait prévenu qu’il se retirerait s’il n’arrivait pas en tête.
"Notre objectif depuis le début était d'éviter que notre région soit marquée du sceau brun" de l'extrême droite victorieuse, s'est félicité M. Woidke. Le SPD a nettement progressé par rapport au précédent scrutin de 2019, où il avait atteint 26,2%.
-- Sécurité et immigration --
Même de justesse, cette victoire régionale offre un répit à Olaf Scholz, au moment où il apparaît plus critiqué que jamais au plan national, à un an du scrutin législatif pour lequel les sondages placent l’opposition conservatrice en pole position.
Sa coalition tripartite associant aussi des écologistes et des Libéraux est tiraillée par des différends croissants.
Le président des Libéraux du FDP, Christian Lindner, n'a pas exclu d'en sortir cette semaine si les trois partis ne parviennent pas à se mettre d’accord "cet automne" sur des priorités communes.
Les conservateurs ont déjà leur candidat, ayant désigné cette semaine le chef de la CDU, Friedrich Merz.
Surfant sur le mécontentement des habitants d'ex-RDA, terreau particulièrement fertile en raison d'inégalités persistantes depuis la réunification, l'AfD est, elle, portée par le retour au premier plan des débats sur la sécurité et l'immigration.
Une série d'attaques à motif islamiste présumé a ébranlé l'Allemagne depuis fin août, dont un triple meurtre au couteau commis à Solingen (ouest) lors d'une fête populaire et pour lequel un Syrien de 26 ans a été arrêté.
Dans le Brandebourg, l'immigration est, selon un récent sondage, le premier sujet de préoccupation des électeurs.
"Naturellement il faut aider les gens, mais nous ne pouvons pas en accueillir trop ici", juge Edeltraud Wendland, 82 ans, à Potsdam.
Le pays enregistre au total un nombre record de réfugiés, avec 3,5 millions de personnes, dont 1,2 million d'Ukrainiens.
Comme en Saxe et Thuringe, le tout nouveau parti populiste BSW, fondé au début de l'année par Sahra Wagenknecht, venue de la gauche radicale, enregistre un succès d'emblée avec environ 12%.
Très virulent contre l'immigration, ce parti qui veut stopper les livraisons d'armes à l'Ukraine, pourrait éventuellement jouer le rôle décisif de faiseur de roi.
Les sociaux-démocrates espèrent continuer à gouverner le Brandebourg au sein d'une coalition avec les conservateurs (12%) et les écologistes, mais ces derniers ne sont pas sûrs d'atteindre le seuil suffisant de 5% pour rester au Parlement régional.
(P.Toussaint--LPdF)