La Finlande et la Suède se rapprochent de l'Otan, ouverture d'un procès pour crimes de guerre à Kiev
La Suède et la Finlande ont soumis mercredi leurs demandes d'adhésion à l'Otan, conséquence directe de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, au moment où un soldat russe comparaît à Kiev pour le premier procès pour crime de guerre depuis le début du conflit.
Sur le terrain, Moscou a affirmé que près de 1.000 soldats ukrainiens retranchés depuis des semaines dans l'immense usine Azovstal à Marioupol (sud-est de l'Ukraine) s'étaient rendus et "constitués prisonniers".
Et sur le front diplomatique, le Kremlin a annoncé l'expulsion de 34 diplomates français, 24 italiens et 27 espagnols, en représailles à celles de diplomates russes peu après l'invasion de l'Ukraine. Un acte "condamné fermement" par Paris et qualifié d'"hostile" par Rome.
A Bruxelles, les ambassadeurs de la Suède et de la Finlande - ce dernier pays partage 1.300 km de frontière avec la Russie - ont présenté leur dossier de candidature au secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, qui a salué "un moment historique à un moment critique pour notre sécurité".
Des consultations sont en cours pour tenter de lever l'opposition d'Ankara, selon une source diplomatique.
La Première ministre finlandaise Sanna Marin a dit souhaiter une ratification "la plus rapide possible" de l'adhésion de son pays qui, comme la Suède, a observé pendant des décennies une politique de non-alignement militaire.
- "Signal clair" -
Près de trois mois après le début de l'invasion de l'Ukraine, le procès d'un soldat russe de 21 ans, accusé d'avoir abattu un civil de 62 ans fin février, s'est ouvert mercredi à Kiev vers 14H00 (11H00 GMT).
Il s'agit du premier procès pour crimes de guerre depuis le début du conflit. Le soldat, Vadim Chichimarine, a plaidé coupable. Il encourt la prison à perpétuité.
Le Kremlin a dit n'avoir "aucune information" sur le procès et le prévenu, assurant que les nombreuses accusations de crimes de guerre visant l'armée russe sont "des fakes ou des mises en scène".
Pour la procureure générale ukrainienne Iryna Venediktova, ce procès est "un signal clair". "Aucun bourreau (...) n'échappera à la justice", a-t-elle promis, disant avoir ouvert plus de 11.000 enquêtes pour crimes de guerre, au moment où les institutions internationales enquêtent également sur les exactions présumées commises par les troupes russes.
A La Haye (Pays-Bas), le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a annoncé déployer en Ukraine une équipe de 42 enquêteurs et experts, soit la plus importante mission en termes d'effectifs jamais envoyée sur le terrain par cette instance.
Et Washington a annoncé mardi la création d'un "observatoire du conflit", doté initialement de six millions de dollars, pour "recueillir, analyser et partager largement les preuves des crimes de guerre" imputés à la Russie en Ukraine.
- Redditions à Azovstal, selon Moscou -
Sur le site de l'aciérie Azovstal à Marioupol, "959 combattants (ukrainiens) dont 80 blessés se sont constitués prisonniers" depuis lundi, a affirmé mercredi le ministère russe de la Défense.
Une information que Kiev n'avait toujours pas commentée en milieu de journée.
L'Ukraine avait assuré la semaine dernière que plus de 1.000 de ses soldats - dont 600 blessés - se trouvaient dans cet immense complexe sidérurgique, dernier bastion de résistance aux forces de Moscou dans la ville ravagée par les combats.
L'armée russe concentre ses efforts "sur le blocage de nos unités près d'Azovstal" avec des tirs d'artillerie et des frappes aériennes, a signalé mercredi matin l'état-major ukrainien.
Mardi, le ministère ukrainien de la Défense avait salué des "héros ukrainiens" ayant "rempli leur mission". Il avait aussi indiqué qu'ils seraient échangés contre des prisonniers russes pour leur permettre de rentrer au pays "le plus rapidement possible", ce qui semblait confirmer que certains de ces hommes étaient bien aux mains des Russes.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait néanmoins affirmé mardi que "la mission d'évacuation" des soldats encore à l'intérieur de l'aciérie Azovstal "se poursuivait", sans préciser le nombre de soldats concernés.
Cette mission implique notamment "les médiateurs internationaux les plus influents", selon le président, qui en a discuté avec son homologue français Emmanuel Macron au téléphone mardi.
La prise totale de Marioupol, cité portuaire stratégique sur la mer d'Azov, assiégée dès début mars par les Russes et chèrement défendue par les Ukrainiens au prix de vastes destructions, constituerait une avancée importante pour Moscou dans ce conflit.
Elle lui permettrait de contrôler une bande de territoire allant de la péninsule de Crimée (sud), que la Russie a annexée en 2014, aux territoires du Donbass (est) déjà aux mains de séparatistes prorusses.
Les pourparlers entre Moscou et Kiev "n'avancent pas", a estimé mercredi le Kremlin, qui a accusé les négociateurs ukrainiens d'"absence totale de volonté" pour trouver une solution politique au conflit.
La veille, la présidence ukrainienne avait dit que les pourparlers étaient suspendus à cause de la Russie.
- "Phase prolongée" -
Sur le terrain, la guerre entre dans une "phase prolongée", a estimé mardi le ministre ukrainien de la Défense Oleksiï Reznikov.
Le long de la ligne de front dans la région de Donetsk (est), sept personnes ont été tuées et six blessées au cours des dernières 24 heures, selon la présidence ukrainienne.
Dans la région voisine, celle de Lougansk, quatre personnes ont été tuées mercredi, a déclaré son gouverneur Serguiï Gaïdaï, qui a annoncé aussi la découverte de deux corps dans le village de Pryvillia.
Les forces russes tentent une percée près de Popasna et en direction de Severodonetsk, l'une des grandes villes de la région sous contrôle ukrainien, a-t-il ajouté, faisant état de "l'intensification des bombardements sur la population civile".
Les forces russes mènent des "offensives tout le long de la ligne de contact" dans la région de Donetsk, et partiellement dans celle voisine de Lougansk, a prévenu mardi le ministère ukrainien de la Défense.
L'armée russe tente "d'encercler et de détruire le regroupement des forces armées ukrainiennes dans les régions de Donetsk et de Lougansk", a confirmé M. Reznikov.
Après des semaines de violents combats autour de petits villages dans ces régions, l'armée russe progresse petit à petit.
A Sydorovié, des journalistes de l'AFP ont vu des champs en flammes et assisté à des bombardements contre ce petit village.
Et "l'ennemi renforce" ses troupes "pour mener une offensive dans la direction de Polohy et Orikhiv", non loin de Zaporijjia, dans le sud-est de l'Ukraine, selon l'état-major ukrainien.
Dans la région de Kharkiv (nord-est) en revanche, les forces ukrainiennes ont annoncé lundi avoir repoussé les troupes de Moscou et repris le contrôle d'une partie de la frontière avec la Russie.
L'est du pays est l'objectif prioritaire des troupes russes depuis leur retrait des environs de la capitale ukrainienne fin mars.
M. Reznikov a appelé mardi les alliés occidentaux de l'Ukraine à plus de coordination dans les livraisons d'armes à Kiev.
Paris va intensifier ses livraisons à l'Ukraine "dans les jours et semaines qui viennent", a promis M. Macron à M. Zelensky lors de leur appel mardi.
Bruxelles a proposé "une nouvelle assistance macrofinancière exceptionnelle" pour l'Ukraine d'un montant allant "jusqu'à 9 milliards d'euros en 2022", selon la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.
Et la Commission a également présenté mercredi un plan à 210 milliards d'euros pour s'affranchir "le plus vite possible" des importations de gaz russe.
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(A.Laurent--LPdF)