Guerre en Ukraine: la situation sur le terrain au 84e jour
La reddition de soldats ukrainiens qui défendaient le site d'Azovstal à Marioupol (Sud-Est) s'est poursuivie mercredi, selon Moscou dont les forces progressent lentement sur la ligne de front, dans la région du Donbass (Est).
Le 84e jour de la guerre, marquée depuis le début de l'invasion russe le 24 février par de très nombreuses victimes civiles, est aussi celui du début à Kiev du procès d'un soldat russe jugé pour crime de guerre.
Voici un point de la situation à partir d'informations des journalistes de l'AFP sur place, de déclarations officielles ukrainiennes et russes, de sources occidentales, d'analystes et d'organisations internationales.
- L'Est -
La guerre entre dans une "phase prolongée", a estimé mardi le ministre ukrainien de la Défense Oleksiï Reznikov. Sur la ligne de front dans la région de Donetsk, sept personnes ont été tuées et six blessées selon Kiev.
Dans la région voisine de Lougansk, quatre personnes ont été tuées mercredi, a déclaré son gouverneur Serguiï Gaïdaï, évoquant aussi la découverte de deux corps dans le village de Pryvillia.
Les forces russes tentent une percée près de Popasna et en direction de Severodonetsk, l'une des grandes villes de la région sous contrôle ukrainien, a-t-il ajouté, dénonçant "l'intensification des bombardements sur la population civile".
Les forces russes mènent des "offensives tout le long de la ligne de contact", a prévenu le ministère ukrainien de la Défense.
L'Institut américain des études de la guerre (ISW) évoque une intensification des tirs d'artillerie sur les installations frontalières ukrainiennes dans les régions de Chernihiv et Sumy ces dernières semaines, dont 70 frappes pour la seule journée de mardi.
L'institut évoque des avancées limitées des forces russes dans le Donbass et la préparation d'une grosse bataille pour Severodonetsk. Les forces russes pourraient "redoubler d'efforts" pour cette bataille, "en partie pour devancer les critiques qui émergent" en Russie sur les erreurs commises lors de l'opération en Ukraine.
- Le Sud -
Sur le site d'Azovstal à Marioupol, "959 combattants (ukrainiens) dont 80 blessés se sont constitués prisonniers" depuis deux jours, a affirmé mercredi le ministère russe de la Défense, information non commentée par Kiev à la mi-journée.
L'armée russe concentre ses efforts "sur le blocage de nos unités près d'Azovstal", avec des tirs d'artillerie et des frappes aériennes, a signalé l'état-major ukrainien.
"Dans la région d'Odessa, un autre missile a été lancé depuis les eaux de la mer Noire. (...) Selon les informations préliminaires, il n'y a pas de destructions importantes et de victimes", selon un communiqué d'un responsable du district Sud reproduit par les médias ukrainiens.
- Justice -
La justice ukrainienne entamait mercredi son premier procès pour crime de guerre depuis l'entrée des troupes de Moscou sur son territoire, celui d'un soldat russe accusé d'avoir abattu un civil non armé.
Le procès, qui devrait être rapidement suivi par plusieurs autres, aura valeur de test pour le système judiciaire ukrainien, au moment où les institutions internationales mènent aussi leurs propres enquêtes sur les exactions commises par les troupes russes.
Le Kremlin affirme ne pas avoir d'information sur la procédure.
- Négociations en panne -
Le Kremlin a accusé l'Ukraine de refuser de négocier. "Les négociations n'avancent pas et nous constatons une absence totale de volonté des négociateurs ukrainiens de poursuivre ce processus", a déclaré à la presse le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
La veille, Kiev avait jugé les Russes responsables de la suspension des pourparlers.
- Rétorsion -
La Russie a annoncé mercredi expulser 34 diplomates français, en représailles aux expulsions en avril par la France de 41 Russes. Paris a "déploré" cette décision. 24 diplomates italiens et 27 espagnols ont subi le même sort.
- Otan -
Suède et Finlande ont soumis mercredi leurs demandes d'adhésion à l'Otan, conséquence directe de l'invasion de l'Ukraine.
La Turquie s'oppose à leur intégration et pourrait bloquer le processus, mais des consultations sont en cours pour tenter de lever l'opposition d'Ankara. "Nous espérons conclure rapidement", a déclaré le secrétaire général de l'alliance atlantique, Jens Stoltenberg.
- Dizaines de milliers de morts -
Il n'existe aucun bilan global des victimes civiles du conflit. Rien qu'à Marioupol, les autorités ukrainiennes ont parlé il y a plusieurs semaines de 20.000 morts. Et les enquêteurs ukrainiens affirment avoir identifié "plus de 8.000 cas" présumés de crimes de guerre.
Sur le plan militaire, le ministère ukrainien de la Défense évalue les pertes russes à 28.300 hommes depuis le début de l'invasion le 24 février. C'est notoirement plus que selon les sources occidentales. Le Kremlin a, lui, tout juste admis des "pertes importantes".
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déclaré qu'environ 2.500 à 3.000 soldats ukrainiens avaient été tués et quelque 10.000 blessés. Aucun chiffre indépendant et fiable n'est disponible.
- Déplacés et réfugiés -
L'Ukraine a vu plus de six millions des siens fuir son territoire, dont plus de la moitié - 3,4 millions - vers la Pologne, selon le Haut commissariat aux réfugiés (HCR) à Genève, qui relève toutefois que le flot de ces départs s'est considérablement tari au fil des semaines et s'est même inversé.
Le solde global reste cependant encore largement négatif - avec 6,3 millions de départs pour 1,85 million de retour, selon les garde-frontières.
(F.Moulin--LPdF)