Les écoles à Marseille: rénover, innover et beaucoup d'attentes
Emmanuel Macron a fait de l'éducation l'un des piliers de son plan "Marseille en grand", avec d'un côté une aide exceptionnelle à la mairie pour rénover les nombreuses écoles insalubres et de l'autre des expérimentations pédagogiques. L'AFP fait le point:
- Un laboratoire destiné à être étendu -
En plus de la rénovation, Emmanuel Macron a voulu faire de Marseille un territoire d'expérimentation pédagogique. Cinquante-neuf écoles, dont une partie ne sont pas en zone d'éducation prioritaire, ont été sélectionnées pour mener à bien un projet spécifique avec la possibilité pour le directeur de participer au choix de son équipe. Un changement profond sachant qu'aujourd'hui le directeur n'a pas de supériorité hiérarchique sur les autres enseignants.
"Ecole des arts", projet calanques, "WELL-BEING: le bien-être et la réussite de tous en éducation prioritaire": les projets sont divers. Sur le terrain, une directrice d'école qui a requis l'anonymat raconte avoir pu recruter une enseignante supplémentaire lors d'un jury composé également de deux inspecteurs et d'un autre enseignant.
Il y a également une quarantaine de projets de "classes flexibles" pour aménager librement les salles comme cette enseignante qui explique que ses élèves "travaillent debout, couchés ou assis" et qu'ils "adorent" la positon debout.
Pour cette expérimentation, l'Etat a débloqué une enveloppe de 2,5 millions d'euros sans allouer précisément une somme à chaque établissement. A ce jour 360.000 euros ont été engagés.
Cette approche va être étendue à partir de l'automne prochain, a annoncé jeudi le président de la République, sans détailler le déploiement et les moyens qui seront attribués.
Emmanuel Macron visitait avec son nouveau ministre de l'Education, Pap Ndiaye, le laboratoire de mathématiques pour les maternelles de l'école Menpenti: une salle équipée de jeux, sabliers, balances, plébiscitée par les élèves et les enseignants qui estiment que ce projet a "relancé une dynamique".
"Le mode de recrutement est une véritable plus-value" car il faut que les enseignants "manifestent leur adhésion au projet", souligne une autre.
Le Snuipp-FSU 13, premier syndicat enseignant du primaire, qui demandait "l'abandon de ce projet", inquiet de "la philosophie de l'expérimentation" et du "risque d’avoir une école à deux vitesses" n'a donc pas été entendu.
"L'école mérite mieux que des effets de communication qui se succèdent. Elle mérite plus de sérieux", s'agace sa secrétaire départementale, Virginie Akliouat.
"Que deviendront les gamins dans les écoles qui ne font pas de projets innovants?", s'interroge pour sa part Isabelle Bonnet, professeur en lycée professionnel à Marseille, venu manifester contre les projets du président.
"Nous nous interrogeons sur la pertinence de généraliser une expérimentation qui n’a pas encore été mise en œuvre" et "sous couvert de projets pédagogiques se cache une casse des statuts, l’application d’un management d’entreprise", estime de son côté Cécile Boulay du Snudi-FO 13.
- Chantier titanesque -
Les écoles ici "sont indignes de la République", lançait le maire de la deuxième ville de France Benoît Payan. Robinets en panne, toitures qui fuient, rats, structures métalliques favorisant la propagation du feu: un tiers des 470 écoles étaient dans un état préoccupant quand l'union de la gauche est arrivée au pouvoir en 2020 après 25 ans de gestion par Jean-Claude Gaudin (LR).
Face à des finances exsangues, rien ne pouvait se faire sans l'Etat, qui a débloqué une aide exceptionnelle de 400 millions d'euros et garantira plus de 650 millions d'euros sur les 800 millions d'emprunts nécessaires. Une société mixte Etat/ville, la Société publique des écoles marseillaises (SPEM), a été créée.
En 2022, une vingtaine de "rénovations lourdes" seront lancées, deux écoles seront livrées en 2023. Au total, 80 écoles seront reconstruites ou créées d'ici 2026. La mairie se laisse jusqu'en 2028 pour venir à bout de ce chantier titanesque et historique.
Pour le Collectif des écoles de Marseille, "les choses avancent dans le bon sens, enfin l'Etat semble mesurer l'enjeu". Mais Cécile Baron, membre du collectif, réclame "davantage de transparence" pour savoir comment on priorise les chantiers pour faire de la pédagogie face à des parents impatients.
(A.Monet--LPdF)