Ukraine: Zelensky se dit certain de la victoire, au 100e jour de conflit
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a affirmé vendredi que son pays sortirait vainqueur de la guerre contre la Russie, au 100e jour du conflit, alors que Moscou, qui concentre ses forces dans la région du Donbass (est), assurait avoir déjà atteint "certains" de ses objectifs.
Depuis l'invasion de l'Ukraine lancée le 24 février par le président russe Vladimir Poutine, son armée a triplé la portion de territoire ukrainien qu'elle contrôle: avec la péninsule de Crimée et les territoires occupés du Donbass et du sud de l'Ukraine, la Russie occupe désormais près de 125.000 km2, selon le président Zelensky, ancien acteur devenu symbole de la résistance acharnée des Ukrainiens.
"Cette guerre n'a et n'aura pas de vainqueur (...) Nous avons besoin de paix. La guerre doit cesser", a averti, au 100e jour de cette guerre qui a déjà fait des milliers de morts, le coordinateur de l'ONU en Ukraine, Amin Awad.
"En un peu plus de trois mois, près de 14 millions d'Ukrainiens ont été contraints de fuir leur foyer, la majorité étant des femmes et des enfants", un phénomène "sans précédent dans l'histoire", a-t-il ajouté dans un communiqué.
Mais les belligérants ne semblent pas près de reprendre sérieusement des négociations de paix, au point mort depuis des semaines.
"La victoire sera nôtre", a affirmé M. Zelensky vendredi dans une brève vidéo où il se filme devant le bâtiment de l'administration présidentielle à Kiev, avec plusieurs de ses proches collaborateurs, diffusée sur Instagram.
Le Kremlin a pour sa part affirmé avoir atteint "certains" des objectifs de son invasion censée "dénazifier" l'Ukraine et protéger sa population russophone, jugeant que de "nombreuses localités" avaient été "libérées", permettant aux populations un retour à "une vie pacifique".
"Ce travail va se poursuivre, jusqu'à ce que tous les objectifs de l'opération militaire spéciale soient remplis", a dit à la presse le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.
- Combats "dans le centre-ville" -
Sur le terrain, le président Zelensky reconnu jeudi que la situation dans l'Est était "vraiment difficile (...) Nous perdons de 60 à 100 soldats par jour, tués au combat, et quelque 500 sont blessés".
"Nous avons rencontré quelques succès dans la bataille pour Severodonetsk", capitale administrative de la région de Lougansk qui, avec celle de Donetsk, forment le Donbass. "Mais il est encore trop tôt. C'est la zone la plus difficile actuellement", avait jugé M. Zelensky, évoquant des difficultés face aux forces russes dans d'autres villes de la région, notamment Lyssytchansk et Bakhmout.
Selon la présidence ukrainienne, "les combats se poursuivent dans le centre-ville" de Severodonetsk vendredi matin. "Les envahisseurs russes continuent de bombarder les infrastructures civiles et l'armée ukrainienne dans les zones de Severodonetsk, Borivsky, Oustynivka et Lyssytchansk", a-t-elle ajouté.
"Nous combattons et tenons chaque mètre de la région de Lougansk", a affirmé vendredi matin Serguiï Gaïdaï, gouverneur de la région de Lougansk. "Depuis 100 jours, (les Russes) détruisent tout ce qui démarquait la région", a-t-il fustigé, dénonçant la destruction de plus de 400 km de routes, 33 hôpitaux, 237 cliniques, près de 70 écoles et 50 maternelles.
Après l'échec en mars de leur tentative d'offensive-éclair pour faire tomber le gouvernement de Kiev, les forces russes se concentrent sur le Donbass, où se joue désormais une "guerre d'usure" sur le "long terme", selon le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg.
- Marioupol bis? -
Les dirigeants ukrainiens ont ces derniers jours accusé Moscou de vouloir faire de Severodonetsk un "nouveau Marioupol". Ce port stratégique sur la mer d'Azov (sud-est), conquis le 20 mai après la reddition de plus de 2.000 combattants ukrainiens qui s'étaient retranchés dans l'aciérie Azovstal, a été dévasté par les bombardements.
Les forces russes bombardent aussi intensément la région de Donetsk, notamment Sloviansk, à quelque 80 km à l'ouest de Severodonetsk. Les habitants de la région manquent de gaz, d'eau et d'électricité, selon Kiev.
Cette région a subi 17 frappes russes ces dernières 24H, avec tous types d'armement (artillerie, chars, mortiers, aviation...), qui ont fait trois morts et huit blessés et endommagé une vingtaine d'immeubles d'habitation, selon la présidence ukrainienne.
L'Ukraine attend des livraisons de systèmes lance-missiles plus puissants promis par le président américain Joe Biden, en espérant que cela change le rapport de force sur le terrain.
Des lignes de chemin de fer de la région de Lviv (ouest) - par laquelle transitent les armes livrées à l'Ukraine par les pays occidentaux - une aide dénoncée par Moscou - ont été bombardées ces derniers jours.
Dans le Sud, les Ukrainiens s'inquiètent d'une possible annexion des régions conquises par les forces russes, Moscou évoquant des référendums sur le sujet dès juillet.
Autour de Mykolaïv, près d'Odessa, les bombardements russes dans la nuit ont fait au moins un mort et un blessé, selon la présidence ukrainienne.
"Les troupes ennemies continuent d'essayer de tenir le terrain" conquis depuis le début de l'invasion autour de Kherson, prise début mars par les Russes, et "des combats sont en cours" suite à une contre-offensive ukrainienne, selon elle.
- Divisions européennes -
Sur le front diplomatique, les 27 pays de l'UE ont péniblement approuvé jeudi un sixième paquet de sanctions contre Moscou incluant un embargo, avec des exemptions, sur les achats de pétrole. Ils ont cependant renoncé à inscrire sur la liste noire le chef de l'Eglise orthodoxe russe, le patriarche Kirill, à la demande de la Hongrie.
"Les consommateurs européens seront les premiers à souffrir de cette décision. Non seulement les prix du pétrole mais aussi ceux des produits pétroliers augmenteront. Je n'exclus pas qu'il y ait un grand déficit de produits pétroliers dans l'UE", a affirmé le vice-Premier ministre russe chargé de l'Energie, Alexandre Novak.
La Serbie, candidate à une adhésion à l'UE, a indiqué avoir passé un accord "très favorable" sur le gaz russe avec Moscou qui a fait grincer Bruxelles.
Le porte-parole de la Commission européenne, Peter Stano, a souligné que l'UE attendait de Belgrade qu'elle "ne renforce pas davantage ses liens avec la Russie" et rappelé que "les pays candidats (...) doivent progressivement aligner leurs politiques envers des pays tiers sur les politiques et positions de l'UE".
Le Premier ministre ukrainien, Denys Chmygal, a estimé que l'Ukraine avançait "avec confiance vers son objectif: vivre dans un pays démocratique, libre, au sein de la famille européenne", tandis que la Russie "se rapproche de la vie derrière le rideau de fer et de l'isolement du monde développé".
Kiev espère obtenir d'ici fin juin le statut officiel de candidat à une adhésion à l'Union européenne, même si les Vingt-Sept sont divisés sur cette question.
Aux Etats-Unis, l'administration Biden a annoncé de nouvelles sanctions visant une série d'oligarques ou membres de "l'élite" de Moscou, dont la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova.
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(C.Fournier--LPdF)