La police de Hong Kong ferme un parc emblématique à la veille de l'anniversaire de Tiananmen
La police de Hong Hong a fermé vendredi, la veille du 33e anniversaire de la répression de Tiananmen, une grande partie le parc Victoria où se déroulait jusqu'en 2019 une veillée aux chandelles commémorative.
Dans la soirée, une forte présence policière y était visible.
Les autorités de l'ancienne colonie britannique avaient peu auparavant averti que la plupart des espaces de rassemblement de ce lieu emblématique – en particulier les terrains de football utilisés pour la veillée aux chandelles les années précédentes – seraient interdits d'accès entre vendredi soir et les premières heures de dimanche.
Et ce "pour empêcher tout rassemblement interdit qui pourrait porter atteinte à la sécurité publique et à l'ordre public et risquer de propager le coronavirus".
Dans le quartier commerçant animé de Causeway Bay, à proximité, un artiste qui avait taillé une pomme de terre pour lui donner la forme d'une bougie et en avait approché un briquet a été emmené dans un car de police, a constaté un journaliste de l'AFP.
Cet homme, Chan Mei-tung, était l'un des trois artistes qui donnaient vendredi soir des spectacles de rue faisant référence de façon détournée aux événements en 1989 de la place Tiananmen de Pékin près de l'un des carrefours les plus fréquentés de Hong Kong.
L'un d'eux a ainsi invité les passants à relever un "défi mathématique" dont la solution était le chiffre 8.964, une référence à la date du 4 juin 1989. Un autre, Sanmu Chan, a présenté une pièce abstraite qui mettait en scène une bougie figée dans un petit bloc de glace.
Tous étaient surveillés de près par la police, qui a rappelé à cette occasion que "participer à une assemblée non autorisée" faisait encourir une peine maximale de cinq ans de prison. Elle a en outre mis en garde les spectateurs contre le risque d'enfreindre la législation sur la distanciation sociale adoptée dans le cadre de la lutte contre la propagation du Covid-19.
Plus tôt dans la journée, les autorités avaient annoncé l'arrestation d'un agent de sécurité de 59 ans soupçonné d'avoir proféré des menaces sur les réseaux sociaux de meurtres de policiers au cours d'événements commémoratifs.
Jeudi déjà, la police s'était efforcée de dissuader la population de prendre part à des rassemblements et donc d'enfreindre la loi de 2020 sur la sécurité nationale imposée par Pékin à Hong Kong - qui jouissait jusqu'ici d'une semi-autonomie - pour étouffer toute velléité d'action en faveur de la démocratie.
- Une allumette et des chansons -
Par le passé, Hong Kong était le seul territoire chinois où étaient tolérés des commémorations et des hommages aux victimes du 4 juin 1989, lorsque le gouvernement chinois avait envoyé des soldats et des chars brutalement réprimer des personnes qui manifestaient pacifiquement pour la démocratie.
En Chine continentale, le sujet reste tabou, que ce soit dans les médias ou les livres.
A Hong Kong, la veillée annuelle avait déjà été interdite en 2020 et 2021, au nom des mesures sanitaires contre le coronavirus.
Les principaux organisateurs des commémorations ont fait profil bas cette année, mais la police affirme avoir vu passer des appels sur les réseaux sociaux à se rassembler dans le parc Victoria ou dans ses alentours.
L'association Hong Kong Alliance, l'organisatrice de la veillée du parc Victoria, est aujourd'hui dissoute et ses dirigeants sont poursuivis pour "incitation à la subversion".
L'ancien chef de l'Alliance, Lee Cheuk-yan, emprisonné, a annoncé dans une lettre qu'il prévoyait de jeûner samedi et qu'il allumerait une allumette et chanterait des chansons commémoratives dans sa cellule.
"Je crois que les Hongkongais se joindront à moi pour marquer le 4 juin en toute sincérité, utilisant leurs propres moyens pour exprimer leur engagement envers la démocratie", a écrit M. Lee dans une lettre diffusée en ligne vendredi.
A Macao, l'ancien député de l'opposition Au Kam-san a souligné que les démocrates n'organiseraient pas de veillée dédiée à Tiananmen cette année en raison de "la détérioration de l'environnement politique" dans cette ancienne colonie portugaise, ajoutant qu'une exposition historique serait également annulée.
M. Au a toutefois fait savoir qu'il allumerait une bougie le 4 juin.
(L.Garnier--LPdF)