Le Pays De France - Equateur: l'armée accuse les manifestations de mettre la démocratie "en grave danger"

Paris -
Equateur: l'armée accuse les manifestations de mettre la démocratie "en grave danger"
Equateur: l'armée accuse les manifestations de mettre la démocratie "en grave danger" / Photo: © AFP

Equateur: l'armée accuse les manifestations de mettre la démocratie "en grave danger"

Au neuvième jour de mobilisation des indigènes en Equateur contre la hausse des prix du carburant, le ministre de la Défense a accusé mardi les manifestations de représenter un "grave danger" pour la démocratie, alors que le dialogue est au point mort.

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"La démocratie en Equateur est en grave danger face à l'action concertée de personnes exaltées qui empêchent la libre circulation de la majorité des Equatoriens", a déclaré Luis Lara, lors d'une déclaration aux côtés des représentants de l'armée.

"Les forces armées ne permettront pas les tentatives de briser l'ordre constitutionnel ou toute action contre la démocratie et les lois de la République", a ajouté le ministre, qui s'exprimait au ministère de la Défense à Quito, encadré par les chefs de l'Armée de terre, de la Marine et de l'Armée de l'air.

La puissante Confédération des nationalités indigènes d'Equateur (Conaie), qui a participé aux révoltes ayant renversé trois présidents entre 1997 et 2005 et mené les violentes manifestations de 2019 (11 morts), organise depuis le 13 juin des marches et barricades pour exiger une baisse des prix du carburant.

Des milliers d'indigènes ont entamé lundi une marche pacifique vers le centre de la capitale depuis Cutuglagua, l'une des deux entrées sud. Plusieurs centaines sont également arrivés par le nord dans Quito (trois millions d'habitants).

Outre le prix du carburant, les manifestants dénoncent le manque d'emplois et l'octroi de concessions minières dans les territoires autochtones. Ils réclament un contrôle des prix des produits agricoles et une renégociation des dettes des paysans auprès des banques.

Sur une avenue occupée lundi par des hommes et des femmes tenant des enfants dans les bras, certains brandissaient des drapeaux équatoriens, d'autres des bâtons ou des boucliers en bois ou en métal.

"Nous sommes le peuple et nous resterons ici jusqu'au bout", a assuré à l'AFP Victor Taday, un indigène âgé de 50 ans originaire de la province de Chimborazo (sud) et qui vit à Quito. Il veut que le président Guillermo Lasso, un ancien banquier au pouvoir depuis mai 2021, "s'en aille".

Dans la ville côtière de Guayaquil (sud-ouest) deux marches massives se sont déroulées lundi, l'une pour la paix et l'autre contre le gouvernement.

- Etat d'urgence étendu -

Au Parlement, les députés ont approuvé lundi soir par 81 voix sur 137 votes une résolution exigeant une proposition gouvernementale de dialogue "sérieuse, claire et honnête" et réclamant une table ronde incluant l'ONU, la Croix-Rouge, les universités et l'Eglise catholique pour chercher des solutions à la crise.

Le parti indigène Pachakutik, bras politique de la Confédération des nationalités indigènes d'Equateur (Conaie) est la deuxième force au Parlement.

Les peuples indigènes rassemblent au moins un million des 17,7 millions d'Equatoriens.

"Nous avons tendu la main, nous avons appelé au dialogue, mais ils ne veulent pas la paix, ils cherchent le chaos, ils veulent chasser le président", a tweeté lundi M. Lasso avec une vidéo montrant des images de manifestants se livrant à des violences dans la rue.

Plus tard dans la journée, après l'arrivée de la marche indigène dans la capitale, M. Lasso a étendu l'état d'urgence de trois à six des 24 provinces du pays en raison de violences avec les forces de l'ordre.

"Cette décision préserve le bien-être des citoyens face à la violence. Dans le même temps, les droits de ceux qui manifestent pacifiquement sont protégés", selon le gouvernement.

Soixante-trois policiers ont été blessés depuis le début des manifestations, selon un bilan officiel, tandis qu'une organisation locale de défense des droits humains a fait état de 79 arrestations et 55 civils blessés.

Depuis près d'un an, le prix d'un gallon de diesel a augmenté de 90% (à 1,90 dollar) et celui de l'essence de 46% (à 2,55 dollars). Les prix sont gelés depuis octobre dernier après les précédentes manifestations, mais la Conaie demande une baisse à respectivement 1,50 et 2,10 dollars.

Avant toute négociation, les indigènes exigent que M. Lasso réponde à leur cahier de doléances.

Dans un autre tweet, le chef de l'Etat a assuré avoir répondu à ces exigences. "Leur réponse? De nouvelles menaces d'attaquer Quito", a-t-il lancé, se disant cependant "toujours ouvert au dialogue".

(N.Lambert--LPdF)