Honduras: les Etats-Unis demandent l'extradition de l'ex-président Hernandez
Les Etats-Unis ont demandé au Honduras l'extradition de l'ex-président Juan Orlando Hernandez, qui a quitté le pouvoir le mois dernier et qui est soupçonné par Washington de trafic de drogue, a indiqué lundi à l'AFP une source officielle.
Sur Twitter, le ministère des Affaires étrangères du Honduras a indiqué avoir remis à la Cour suprême du pays une "communication officielle de l'ambassade des Etats-Unis" demandant formellement l'arrestation d'un "politique hondurien" aux fins d'extradition, mais sans préciser le nom de cette personne.
La chaîne CNN a montré à l'antenne ce document du ministère, qui demande bien "l'arrestation provisoire aux fins d'extradition vers les Etats-Unis d'Amérique de Juan Orlando Hernandez Alvarado".
La Cour suprême se réunira d'urgence mardi pour désigner un juge chargé d'examiner cette demande, a appris l'AFP auprès d'une source officielle.
Un important dispositif de sécurité était visible dans la nuit de lundi à mardi autour de sa résidence dans le quartier de San Ignacio, à Tegucigalpa.
L'avocat de M. Hernandez, Hermes Ramirez, a estimé que ce déploiement policier, qui selon lui empêchait les conseillers de l'ancien président d'accéder à son domicile, constituait une "atteinte" aux droits de son client.
Pour le moment, aucun mandat d'arrêt n'a été notifié ni aucun juge désigné pour examiner le dossier, a dénoncé M. Ramirez sur la chaîne de télévision TN5.
M. Hernandez, 53 ans, désigné habituellement par ses initiales JOH, a quitté le pouvoir le 27 janvier à l'issue de deux mandats à la tête du Honduras depuis 2014.
Son frère cadet et ancien député, Antonio "Tony" Hernandez, a été condamné en mars 2021 aux Etats-Unis à la prison à vie pour trafic de drogue. Les procureurs de New York soupçonnent JOH d'être son complice.
- "Les narines des gringos" -
Un autre des proches de l'ancien chef d'Etat, Geovanny Fuentes Ramirez, a lui aussi été condamné à perpétuité la semaine dernière pour narcotrafic par le tribunal fédéral de Manhattan, à New York.
Durant le procès, les procureurs ont accusé JOH d'avoir aidé l'accusé à faire passer de la cocaïne aux Etats-Unis.
M. Fuentes Ramirez a lui-même affirmé pendant l'audience que le président Hernandez lui avait dit qu'ils allaient "mettre la drogue dans les narines des gringos" sans même qu'ils s'en rendent compte.
Jusqu'à présent, aucune inculpation formelle n'a cependant été prononcée contre JOH.
L'ancien chef d'Etat a rejeté toutes les accusations qu'il a qualifiées de "vengeance", affirmant avoir fait arrêter et livrer aux Etats-Unis de nombreux narcotrafiquants.
Au Honduras, JOH est aussi accusé par ses adversaires politiques de corruption dans le cadre de contrats d'infrastructures et de fournitures pour lutter contre la pandémie de coronavirus.
Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a révélé le 7 février que M. Hernandez figurait, depuis le 1er juillet 2021, sur une liste de personnes accusées par les Etats-Unis de corruption ou d'atteintes à la démocratie en Amérique centrale.
JOH a "commis ou facilité des actes de corruption et de narcotrafic, et utilisé des gains de ces activités illicites pour des campagnes politiques", avait affirmé M. Blinken dans un communiqué.
M. Hernandez, remplacé le mois dernier à la présidence par sa rivale politique Xiomara Castro, est depuis membre de droit du Parlement d'Amérique centrale, un privilège dont bénéficient tous les anciens chefs d'Etat de la région après avoir quitté le pouvoir.
Selon son avocat, cette fonction lui confère l'immunité.
Un mois avant l'élection de novembre, JOH avait surpris tout le monde en signant un accord frontalier avec son homologue nicaraguayen Daniel Ortega lors d'une visite éclair à Managua qui avait éveillé les soupçons.
MM. Hernandez et Ortega maintiennent de bonnes relations, et le Nicaragua est un pays où se réfugient fréquemment les hommes politiques d'Amérique centrale recherchés par la justice. Deux anciens présidents salvadoriens --Mauricio Funes (2009-2014) et Salvador Sanchez (2014-2019)-- ont même obtenu la nationalité nicaraguayenne, les mettant ainsi à l'abri de toute extradition vers chez eux ou vers les Etats-Unis.
(A.Monet--LPdF)