A New York, longues files d'attente pour se faire vacciner contre la variole du singe
Avec ses tables et chaises alignées et le matériel médical, le gymnase, dans un lycée de Brooklyn, rappelle un centre de vaccination anti-Covid: mais c'est pour la variole du singe qu'il a ouvert dimanche à New York, "épicentre" américain de la maladie virale.
A l'extérieur, dans le quartier de Bushwick, une longue file d'attente s'est formée sur le trottoir, pour une très grande majorité des hommes âgés d'une vingtaine à une quarantaine d'années, désireux de protéger leur entourage et d'éviter la variole du singe, ses éruptions cutanées et ses douleurs.
Tous ceux que l'AFP a interrogés ont le sentiment d'avoir eu de la chance, tant il a été difficile d'obtenir un rendez-vous sur le site internet dédié de la ville, qui manque de doses. Vendredi, 9.200 créneaux ont été libérés à 18h et sont partis en sept minutes. Trois jours plus tôt, le trafic était tel qu'il a submergé le site et l'a mis en panne.
La ville de plus de 8 millions d'habitants a vu les contaminations grimper la semaine dernière, avec 461 cas répertoriés vendredi depuis l'apparition de la maladie aux Etats-Unis en mai, contre 223 lundi.
- Connectés -
"C'est frustrant, surtout parce qu'avec le Covid, on aurait pu penser qu'il y aurait un processus plus structuré de déploiement des vaccins, mais il n'y avait pas vraiment de processus", raconte Aidan Baglivo, un analyste de données de 23 ans, pour qui les personnes les mieux connectées aux réseaux sociaux sont privilégiées.
"Cela ne devrait pas être un problème, car il y a déjà un vaccin, et chaque jour où il n'y a pas plus de personnes vaccinées est gâché", déplore Robert, 28 ans. Lui-même a pu avoir un rendez-vous, en rafraîchissant la page "comme un taré", mais pas son compagnon ni son meilleur ami.
Tout le monde peut attraper la variole du singe, qui se transmet par contacts étroits, mais le vaccin Jynneos est pour l'instant réservée aux hommes ayant des relations sexuelles avec les hommes, la plus grande majorité des cas. De quoi alimenter les craintes que la communauté LGBTQ, dont New York est l'une des capitales, soit davantage stigmatisée et que le virus devienne "une maladie gay" dans les esprits.
- "Peur" -
Variole du singe ("monkeypox" en anglais), "c'est vraiment un nom qui fait peur", redoute Robert.
Pour Nathan Tylutki, un acteur de 42 ans, "peut-être qu'il y aurait une réponse pour développer plus de vaccins si cela n'affectait pas les personnes queer". D'après lui, on trouvera peu d'anti-vaccins dans cette communauté, "parce que nous avons vu les maladies, nous savons ce qu'est le sida".
La variole du singe guérit en général spontanément, mais elle se caractérise par des éruptions cutanées -- qui peuvent apparaître sur les organes génitaux ou dans la bouche -- et peut s'accompagner de poussées de fièvre, maux de gorges et parfois de fortes douleurs.
La mégapole de la côte est américaine comptabilise 21.500 doses de vaccins déjà injectés ou de rendez-vous pris et elle espère pouvoir accélérer avec la promesse de plus de 30.000 vaccins pour l'Etat de New York tout entier, dont elle devrait recevoir une bonne part. Mais faute de doses, le site de Bushwick ne devait pas rouvrir lundi.
"Nous avons besoin de dizaines de milliers de doses", a insisté dimanche le commissaire à la Santé de la ville, Ashwin Vasan.
Dans la file d'attente, Leroy Jackson, un professeur de fitness de 27 ans, a une autre inquiétude.
"Je dois être le seul ou peut-être nous sommes deux ou trois personnes noires dans cette queue", sur plus d'une centaine de personnes qui patientent, constate-t-il, en soulevant la question de l'accès aux rendez-vous pour les minorités et les moins privilégiés.
(A.Renaud--LPdF)