Roland-Garros: Iga Swiatek, le discret rouleau compresseur
Avec humilité, discrétion et timidité, Iga Swiatek marque chaque année un peu plus l'histoire du tennis, auréolée samedi d'un quatrième titre à Roland-Garros, le troisième consécutif, et avance à la manière d'un rouleau compresseur mû par un caractère combatif qui la porte depuis ses premières frappes sur les courts de tennis de Varsovie.
Tout a bien changé depuis son arrivée au plus haut niveau sur la pointe des pieds, en 2020, lorsqu'elle a remporté à la surprise générale son premier tournoi du Grand Chelem dans le quasi-anonymat d'un triste Roland-Garros automnal sous Covid.
Quatre ans plus tard, c'est en tant qu'immense favorite qu'elle a battu en finale l'Italienne Jasmine Paolini (6-2, 6-1). A 23 ans, la Polonaise continue à creuser l'écart en tant que N.1 mondiale, bien loin devant ses poursuivantes Coco Gauff et Aryna Sabalenka.
Tout a changé, mais pas Swiatek, qui fait toujours preuve d'une grande discrétion. Elle qui sur le terrain se transforme en machine, distribuant les bagels (sets remportés 6-0) à ses adversaires à tour de bras comme lors de ce 8e de finale express contre la Russe Anastasia Potapova (6-0, 6-0 en 40 minutes).
Avant d'en arriver là, elle a fait son apprentissage à Varsovie, où elle est née le 31 mai 2001. "C'était une petite fille qui voulait apprendre le plus vite possible à jouer. Et quand elle a appris, ce qui comptait le plus pour elle c'était de gagner", se rappelle son premier entraîneur, Artur Szostaczko.
"C'était une combattante... Je savais que si un set allait jusqu'au tie-break, il n'y avait pas à s'inquiéter, elle n'allait pas craquer", raconte le coach à l'AFP.
Désormais, la joueuse est au sommet du tennis féminin, avec à son palmarès cinq titres du Grand Chelem (Roland-Garros 2020, 2022, 2023 et 2024, US Open 2022), 21 titres au total sur le circuit.
- Sourire et agressivité -
Artur Szostaczko garde en tête l'image de cette enfant amusante, toujours avec des couettes, toujours en mouvement, avec une coordination phénoménale et un éternel sourire aux lèvres. "Je lui ai appris à jouer de manière agressive parce que c'est l'avenir du tennis. Aujourd'hui elle le fait de manière formidable", souligne-t-il.
Son entraîneur suivant, Michal Kaznowski qui l'a suivie jusqu'à ce qu'elle ait 15 ans, s'est inspiré de la phrase devenue célèbre de Serena Williams quand elle avait 11 ans, et qui, alors qu'on lui demandait à qui elle voulait ressembler, avait répondu: "J'aimerais que les autres soient comme moi".
"Nous avons suivi cette idée... pour développer son propre style, sa propre personnalité", dit Kaznowski.
L'entraîneur et sa joueuse se sont tournés vers le tennis masculin pour trouver des modèles à suivre - Iga Swiatek est une fan absolue de Rafael Nadal -, évitant d'en chercher parmi les joueuses, de crainte qu'Iga ne se retrouve un jour face à l'une d'entre elles.
Et quand on lui demande cette saison ce que ça lui fait d'être justement comparée à Nadal - 14 fois vainqueur à Paris - par la presse, elle répond toujours avec humilité: "On verra dans 14 ans si le parcours est le même".
- De lycéenne à championne -
En 2019 en Australie, elle a joué son premier tournoi du Grand Chelem, atteignant le 2e tour. Quelques mois après, elle n'a tenu que 45 minutes en 8es de finale face à Simona Halep pour son premier Roland-Garros.
Les planètes ont commencé à s'aligner en 2020: un huitième de finale à Melbourne, un troisième tour à l'US Open et donc ce titre aux Internationaux de France - son tout premier sur le circuit principal - avec des victoires prestigieuses (Osaka, Halep, Wozniacki, Vekic). De quoi la propulser dans le top 20 mondial.
Encore lycéenne en 2019, elle avait été d'ailleurs diplômée cette année-là. Désormais, c'est sur la terre battue de Roland-Garros qu'elle collectionne, non pas les bonnes notes, mais les titres.
Et sur les courts, la Polonaise, qu'entraîne désormais Tomasz Wiktorowski, arrivé fin 2021, reste studieuse, avec notamment une psychologue qui l'aide à préparer ses matchs. "Elle m'a rendue plus intelligente. Grâce à elle, mon niveau de confiance est plus élevé", racontait-elle en 2020.
"La force mentale est particulièrement importante. Au haut niveau, tout le monde est capable de bien jouer, mais les meilleures, ce sont celles qui sont les plus fortes dans la tête", estimait celle que Sierzputowski, son coach de 2016 à 2021, qualifiait de "bête de compétition".
(V.Castillon--LPdF)