Coupe d'Europe de rugby: le chemin de croix irlandais de Toulouse
Ulster, Munster et maintenant Leinster: la campagne européenne de Toulouse est un véritable chemin de croix, qui passera samedi par une demi-finale à l'Aviva Stadium de Dublin contre l'adversaire sans doute le plus relevé de ce terrible triptyque irlandais.
La légende raconte que Saint Patrick, lors de sa mission d'évangélisation de l'Irlande, se serait servi d'un trèfle pour expliquer aux autochtones, païens, le concept de la sainte trinité: trois entités - le Père, le Fils et le Saint-Esprit - formant un tout.
L'emblème du pays illustre bien également la saison du Stade toulousain en Coupe d'Europe, marquée depuis le début de la phase finale par des confrontations avec trois provinces irlandaises aux préceptes similaires.
Les affronter tour à tour, "c'est presque comme enchaîner trois étapes alpestres (du Tour de France cycliste) dans une même journée", a joliment résumé dans les colonnes du bihebdomadaire spécialisé Midi Olympique l'entraîneur de l'attaque du XV de France Laurent Labit.
Le tenant du titre a d'abord attaqué le col de l'Ulster par ses deux faces (défaite 26-20 à l'aller, victoire 30-23 au retour à Belfast) en guise de mise en jambes, avant de basculer d'extrême justesse en tête du Mont Munster (24-24 ap, 4-2 tab) et de poursuivre sa montée en puissance par un Alpe d'Huez rugbystique, le Leinster, quadruple champion d'Europe.
- Un "Tour d'Irlande copieux" -
Au moment d'enchaîner Clermont, Bordeaux-Bègles et La Rochelle l'an dernier dans la conquête d'une cinquième étoile continentale, l'entraîneur toulousain Ugo Mola avait reconnu qu'il n'était pas forcément fan des confrontations franco-françaises en Coupe d'Europe, une compétition censée proposer d'autres "philosophies" de jeu.
La multiplication des allers-retours avec l'Irlande cette année n'est donc pas pour lui déplaire: "Sportivement, c'est génial. On joue ce qui se fait de mieux dans le rugby européen, avec des caractéristiques très marquées".
"Le Tour d'Irlande est quand même copieux", concède-t-il. "Est-ce que l'on est capable de battre Ulster, Munster et Leinster? Je ne suis pas sûr que ce triptyque ait déjà été fait. Si on est en mesure de le faire, on aura très certainement marqué une page importante de l'histoire du club".
Placées sous l'égide de la Fédération irlandaise, avec le XV du Trèfle au sommet de la pyramide, les trois provinces proposent un jeu relativement semblable, à la fois très structuré, discipliné et rugueux.
"Allez leur dire qu'ils jouent de la même manière. On peut le penser ici, mais ils sont convaincus là-bas que ce n'est pas le cas", nuance Mola, persuadé de monter encore d'un cran ce week-end face à "une référence du rugby européen".
- "60.000 hommes en bleu" -
C'est aussi l'avis d'Aidan McCullen, un ancien troisième ligne irlandais passé par Toulouse lors de la saison 2005-06, "l'un des plus grands accomplissements" de sa carrière.
Le Leinster, raconte-t-il à l'AFP, se repose depuis longtemps sur "un système éducatif très efficace pour former les jeunes joueurs" et un bassin de population plus large avec la capitale, Dublin. "Vous avez donc naturellement plus de chances de voir émerger des talents".
La province de l'est irlandais jouit aussi selon lui d'un public "beaucoup plus nombreux et fidèle" aujourd'hui qu'à ses débuts. La promesse d'une nouvelle chaude ambiance à l'Aviva Stadium après celle assurée par la "Red Army" du Munster.
"On avait 40.000 hommes en rouge la semaine dernière contre nous. Là, on sera plutôt à 60.000 hommes en bleu", anticipe l'arrière et buteur toulousain Thomas Ramos. "Ce sont des atmosphères qu'on aime. Des gros matches qu'on attend toute la saison".
Quoi qu'il arrive, le Stade en aura définitivement terminé samedi soir avec l'Irlande. Il retrouvera en cas de victoire, en finale à Marseille, un adversaire moins exotique: La Rochelle ou le Racing 92.
(O.Agard--LPdF)