Pour la première fois depuis Apollo, une sonde américaine va tenter de se poser sur la Lune
Elle n'est pas la première à essayer, mais espère faire mieux que ses concurrentes: l'entreprise texane Intuitive Machines tentera jeudi de devenir la première société privée à réussir à se poser sur la Lune.
Un succès marquerait non seulement une étape majeure pour le secteur spatial, mais aussi le premier atterrissage d'une sonde américaine sur la Lune depuis la fin du mythique programme Apollo, en 1972.
L'alunisseur Nova-C, qui transporte notamment des expériences scientifiques de la Nasa, a décollé la semaine dernière de Floride, et se dirige depuis sans encombre vers sa destination.
La tentative d'alunissage doit avoir lieu à 16H49 heure de Houston, au Texas, où est installée la salle de contrôle d'Intuitive Machines (22H49 GMT).
Le système de propulsion de l'appareil, crucial pour l'alunissage, a déjà été testé avec succès en vol.
Il doit encore passer une étape importante mercredi, avec une poussée du moteur devant permettre à l'appareil d'entrer en orbite lunaire, à environ 100 km d'altitude. Il y restera environ 24 heures avant sa descente finale.
Celle-ci, entièrement automatisée, pourra être suivie en direct sur le site de la Nasa.
A partir de 30 mètres d'altitude, l'alunisseur descendra à la verticale à une vitesse de trois mètres par seconde, avant de freiner à un mètre par seconde pour les dix derniers mètres.
Intuitive Machines s'attend à pouvoir confirmer l'alunissage environ 15 secondes après que les six pieds de la sonde touchent le sol.
L'Inde et le Japon sont récemment parvenus à se poser sur la surface lunaire grâce à leurs agences spatiales nationales, devenant les quatrième et cinquième pays à réussir la manoeuvre, après l'Union soviétique, les Etats-Unis et la Chine.
Mais les Américains, qui cherchent à renvoyer des astronautes sur la Lune à partir de 2026, ne l'ont pas fait depuis plus de 50 ans. Et aucune des entreprises privées ayant tenté l'exploit -- israélienne, japonaise ou américaine -- n'a encore réussi.
- Pôle sud lunaire -
L'endroit visé par Intuitive Machines se trouve à environ 300 kilomètres du pôle sud de la Lune. Les missions du programme Apollo atterrissaient, elles, plus près de l'équateur.
Le pôle sud lunaire intéresse les différentes nations engagées dans cette course, car il s'y trouve de l'eau sous forme de glace, qui pourrait être exploitée.
Le cratère qui doit faire office de piste d'atterrissage est nommé Malapert A, du nom d'un astronome du 17e siècle.
L'alunisseur d'un peu plus de quatre mètres de haut emporte six cargaisons privées, et six instruments scientifiques de la Nasa.
Parmi les chargements commerciaux: des sculptures de l'artiste contemporain Jeff Koons représentant les phases de la Lune.
Mais aussi un système de caméras développé par l'université d'aéronautique Embry-Riddle, qui sera éjecté à 30 mètres au-dessus de la surface lunaire, pour capturer de l'extérieur le moment de l'atterrissage.
Le matériel embarqué de la Nasa se concentre lui sur de premières observations de cette région encore peu explorée.
Des caméras placées sous l'alunisseur analyseront la quantité de poussière projetée lors de la descente, afin de la comparer aux alunissages d'Apollo.
Un autre instrument étudiera le plasma lunaire (couche de gaz chargé en électricité), et mesurera les ondes radio en provenance du Soleil et d'autres planètes.
L'alunisseur, dont l'exemplaire utilisé pour cette mission a été baptisé Odysseus, sera alimenté en énergie grâce à ses panneaux solaires.
Il est prévu qu'il fonctionne durant sept jours à partir du moment de son atterrissage, avant que la nuit ne s'installe sur le pôle sud.
- Réduire les coûts -
Le contrat signé par l'agence spatiale américaine pour cette première mission d'Intuitive Machines s'élève à 118 millions de dollars.
Il s'agit de la deuxième mission du nouveau programme CLPS de la Nasa, qui a chargé des sociétés privées d'emporter sur la Lune son matériel scientifique, au lieu de développer elle-même des véhicules pour le faire.
L'objectif est de réduire les coûts pour l'agence publique, tout en développant l'économie lunaire.
Une première mission, menée par l'entreprise américaine Astrobotic, avait échoué le mois dernier.
Au total, quatre autres missions américaines sont encore officiellement prévues cette année après celle-ci, dont deux autres d'Intuitive Machines.
Pour la Nasa, ces missions doivent notamment préparer le retour d'astronautes sur la Lune dans le cadre de son autre programme phare, Artémis.
(A.Renaud--LPdF)